Examen en matière de la fiscalité immobilière en Guinée ( Par Dr Mamadou Aliou BAH)

A l’heure de la factorisation électronique, la fiscalité locale traine les pas en Guinée. Il s’avère qu’au regard de l’urbanisation croissante des villes Guinéennes, la fiscalité foncière urbaine est une source de revenus assez importante pour les collectivités locales guinéennes et communes en particulier. Il est absolument nécessaire pour les pouvoirs publics de mettre l’accent sur cet impôt, car une urbanisation exponentielle et non maitrisée engendre des besoins nouveaux en infrastructures d’assainissement, d’électrification et de conduite d’eau, sans oublier les infrastructures sociales (centres de santé, écoles, etc.) ainsi que des services de sécurité comme la police. Cependant, pour que l’impôt foncier soit bien accueilli et respecté par les contribuables, les bases de son imposition doivent être clairement définies et compréhensibles pour tous.

En outre, le réalisme doit entourer la détermination de ses différents barèmes afin qu’il soit moins onéreux pour les contribuables pour ne pas constituer un prétexte de surenchère sur l’offre immobilière et partant, mettre en mal les revenus des classes moyennes ou les couches les moins nanties. Voyons comment pourrait –on améliorer le système actuel d’imposition des revenus fonciers, en faisant le regard sur la fiscalité immobilière avant synthétisation et quels sont les arguments en faveur d’une taxation future du foncier avec la fiscalité immobilière post-synthétisation ou la Contribution Foncière Unique (CFU).

– FISCALITE IMMOBILIERE AVANT-SYNTHETISATION

Le code des contributions diverses de 1966 a largement fait allusion dans ses colonnes y compris quelques lois de finances à savoir : l’impôt sur le foncier bâti ; l’impôt sur les propriétés non bâties ; la taxe d’habitation ; l’impôt sur le revenu foncier. Tout d’abord, l’impôt sur le foncier bâti est un prélèvement fiscal qu’opérait le fisc sur les propriétés effectivement bâties (maisons d’habitation, immeubles, usines, outillages industriels, manufactures, etc.) fixées au sol et à perpétuelle demeure dont le contribuable avait la disposition ou la jouissance au cours de l’année d’imposition.

Il est perçu en République de Guinée, au profit des Budgets locaux, une contribution annuelle sur les propriétés bâties telles que maisons, fabriques, manufactures, usines et en général tous immeubles construits en maçonnerie, fer ou bois, et fixés au sol à demeure à l’exception de ceux qui en sont expressément exonérés par les dispositions sur la contribution foncière sur les propriétés bâties et personnes imposables et débiteurs de l’impôt.

-LA CONTRIBUTION FONCIERE SUR LES PROPRIETES BATIES

Sont également soumis à la contribution foncière des propriétés bâties : Les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel tels que chantiers, lieux de dépôt de marchandises et autres emplacements de même nature, soit que le propriétaire les occupe, soit qu’il les fasse occuper par d’autres à titre gratuit ou onéreux. L’outillage des établissements industriels attaché au fonds à perpétuelle demeure ou reposant sur des fondations spéciales faisant corps avec l’immeuble ainsi que toutes installations commerciales ou industrielles assimilées à des constructions.

-Sont exemptes de la contribution foncière des propriétés bâties :

Les immeubles, bâtiments ou constructions appartenant à l’Etat guinéen, aux Régions administratives et Communes villageoises, aux établissements publics, lorsqu’ils sont affectés à un service public ou d’utilité générale et sont improductifs de revenus. Les ouvrages établis pour la distribution d’eau potable ou de l’énergie électrique et appartenant à l’Etat ou à des Régions administratives : les édifices servant à l’exercice public des cultes ; les immeubles à usage scolaire ; les immeubles affectées à des œuvres d’assistance médicale ou d’assistance sociale ; les immeubles servant aux exploitations agricoles pour les animaux ou serrer les récoltes ; les immeuble servant exclusivement à l’habitation et habités par leurs propriétaires lorsque le revenu net est inférieur à 20 000 francs Guinéens.

-Exemption Temporaire

Les constructions nouvelles, les recouvrements et les additions de constructions ne seront soumises à la contribution foncière que la onzième année suivant l’année de leur achèvement s’il s’agit de maison d’habitation et la sixième année dans les tous autres cas. Si les maisons d’habitation sont ultérieurement affectées à un autre usage, le délai ci-dessus est ramené à cinq ans. L’exemption temporaire n’est pas applicable aux terrains à usage commerciale ou industriel qui sont cotisables à partir du 1er octobre de l’année suivant celle de leur affectation. Pour bénéficier de l’exemption temporaire spécifier le propriétaire devra souscrire et adresse au Contrôle des Contributions Diverses dans un délai de quatre mois à partir du jour du commencement des travaux, une déclaration indiquant la nature du nouveau bâtiment, sa destination, la superficie qu’il couvrira, les désignations du terrain telles qu’elles figurent au livre foncier. Cette déclaration devra être appuyée d’un plan sommaire ou d’un croquis côte. Le propriétaire devra en outre, dès l’achèvement des travaux et au plus tard avant le 1er octobre de l’année suivant celle de cet achèvement, remettre au Contrôle un certificat d’habitabilité, constatant que l’immeuble remplit les conditions de salubrité exigées par les Services d’hygiène. Les déclarations doivent être faites par écrit. A défaut de déclaration ou de remise de certificat d’habitabilité dans les détails impartis aux articles 257 et 259 ci-dessus, les constructions nouvelles, additions de constructions et reconstructions sont imposées dès le 1er octobre de l’année qui suivra celle de leur achèvement. La souscription des déclarations de constructions et le dépôt de certificat d’habitabilité après l’expiration des délais fixés aux articles 257 et 258 donnent droit aux exemptions d’impôts prévues à l’article 256 pour la fraction de la période d’exemption restant à courir à partir du 1er octobre de l’année suivante celle de leur production. Les immeubles d’habitations occupés par leurs propriétaires eux-mêmes ou les membres de leur famille sont exemptés de la contribution foncière des propriétés bâties pour la durée du Plan Septennal allant du 1er mai 1964 au 1er mai 1971. Pour la durée du Plan Septennal allant du 1er mai 1964 au 1er mai 1971, les immeubles d’habitation loués à des tiers à un loyer mensuel inférieur ou égal à 20 000 sont exemptés de la contribution foncière des propriétés bâties.

– Assiette sur les propriétés bâties

La contribution foncière des propriétés bâties est réglée en raison de la valeur réelle de ces propriétés au 1er octobre de l’année de l’imposition sous déduction de 40% pour les maisons et 50% pour les usines, en considération du dépérissement et des frais d’entretien et de réparation. La valeur locative réelle des sols et des bâtiments de toute nature et des terrains formant dépendance indispensable et immédiate des constructions entre, le cas échéant, dans l’estimation du revenu net servant de base à la contribution foncière des propriétés bâties afférente à ces constructions. La valeur locative est déterminée au moyen de baux authentiques ou de locations verbales passées dans les conditions normales.

En l’absence d’actes de l’espèce, l’évaluation est établie par comparaison avec des locaux dont le loyer aura été régulièrement constaté ou sera notoirement connu. Si aucun de ces procédés ne peut être appliqué, la valeur vénale, détermination du taux moyen d’intérêt des placements immobiliers dans la région considérée pour chaque nature de propriété, application du taux d’intérêt à la valeur vénale. Pendant l’application du Régime fiscal de longue durée dont sont appelés à bénéficier les entreprises définies par la délibération 1-57 du 2 février 1957 et pour ces seules entreprises la valeur locative réglant la contribution foncière des propriétés bâties sera fixée par décret du Président de la République après avis de la Commission ad hoc.

-Personnes Imposables et Débiteurs de l’Impôt

La contribution foncière des propriétés bâties est due pour l’année entière par le propriétaire au 1er octobre de l’année de l’imposition sauf le cas prévu à l’article 264 ci-après.

-Les personnes Imposables

En cas d’usufruit, l’imposition est due par l’usufruitier dont le nom doit figurer sur le rôle à la suite de celui du propriétaire. En cas de bail emphytéotique le preneur ou emphytéote est entièrement substitué au bailleur. Lorsqu’un propriétaire de terrain ou d’immeuble portant une construction sans grande valeur, loue le fonds par bail de longue durée, à charge par locataire de construire à ses frais un immeuble bâti de valeur ou de consistance donnée devant revenir sans indemnité et libre de toutes charges au bailleur à l’expiration du bail, la contribution foncière des propriétés bâties est due, à raison de l’immeuble construit, par le propriétaire du sol. Lorsqu’un propriétaire de terrain ou d’immeuble portant une construction sans grande valeur, loue le fonds par bail de longue durée, à charge par le locataire de construire à ses frais un immeuble bâti de valeur ou de consistance donnée devant revenir sans indemnité et libre de toutes charges au bailleur à l’expiration du bail, la construction foncière des propriétés bâties est due, à raison de l’immeuble construit, par le propriétaire du sol. La valeur locative imposable au nom du propriétaire sera considérée pendant toute la durée du bail comme équivalente à acuité correspondant à la somme nécessaire pour amortir, pendant la durée du bail, le prix des travaux exécutés et des charges imposées au preneur. Dans le cas considéré, la contribution foncière est due par le propriétaire et partir du 1er octobre de l’année qui suit celle de l’achèvement de la construction édifiée par le locataire sauf application des dispositions des articles 256 à 261 relatifs à l’exemption temporaire. Pour la détermination des valeurs locatives, les propriétaires et principaux locataires et, en leur lieu et place, les gérants d’immeubles sont tenus de fournir par écrit aux agents chargés de l’assiette de l’impôt, quand il leur en sera fait la demande, et dans les dix jours de la réception de ladite demande adressée par pli recommandé, une déclaration indiquant au jour de sa production : Les noms et prénoms usuels de chaque locataire, la consistance des locaux qui leur sont loués, le montant du loyer principal et, s’il y a lieu, le montant des charges ; les noms et prénoms usuels de chaque occupant à titre gratuit et la consistance du local occupé ; la consistance des locaux occupés par le déclarant lui-même ; la consistance des locaux vacants. Le défaut ou l’inexactitude de la déclaration sera sanctionné par une amende fiscale de mille francs guinéens encourue autant de fois qu’il est relevé d’omissions ou d’inexactitudes dans les renseignements qui doivent être fournis en exécution des dispositions du présent article. Les amendes fiscales sont constatées par le Contrôle Régional des Contributions Divers et sont recouvrées comme en matière de contributions directes.

-Taux de l’Impôt

Le taux de la contribution foncière sur les propriétés bâties est fixé comme suit : 20% pour les revenus nets annuels supérieurs à 400 000 francs guinéens ; 15% pour les revenus nets annuels compris entre 200 000 francs guinéens ; 10% pour les revenus nets annuels au-dessus de 200 000 francs guinéens.

-Remises et Modérations pour Pertes de Revenus

En cas de vacances de la maison ou de chômage d’établissement commerciaux et industriels, les propriétés peuvent obtenir la remise ou la modération de la contribution foncière assise sur ces immeubles, lorsqu’il est établi que la vacance ou le chômage, qu’ils soient totaux ou partiels, sont indépendants de l’inoccupation a été de six mois consécutifs. Le point de départ de cette période est le premier jour du mois suivant l’ouverture de la vacance ou du chômage. Les réclamations pour vacances de maison ou chômage d’établissements commerciaux et industriels doivent être adressées au Directeur des Contributions Diverses dans le mois qui suit l’expiration de la période pour laquelle le dégrèvement est susceptible d’être obtenu. Lorsqu’un immeuble ayant déjà fait l’objet d’un précédent dégrèvement continue à être inhabité ou inexploité, le propriétaire ne peut reproduire utilement sa demande qu’après l’expiration d’une nouvelle période d’inoccupation ou de chômage de six mois. Toutefois si la vacance ou l’inexploitation viennent à cesser au cours d’une période de six mois suivants celle pour laquelle un dégrèvement a déjà été accordé, la réclamation sera recevable pour la fraction de période de vacances ou d’inexploitation dans le mois qui suivra la cessation de celle-ci.

Dans le cas de destruction totale ou partielle ou démolition volontaire en cours d’année de leurs maison ou usines, les propriétaires peuvent demander la remise ou la modération de la contribution foncière frappant ces immeubles. Les demandes doivent être adressées au Directeur du Service des Contributions Diverses dans le mois de la destruction ou l’achèvement de la démolition. Le dégrèvement est accordé à partir du premier du mois suivant la destruction ou l’ouverture des travaux de démolition.

-Rôles, Exigibilité et Contentieux

Les rôles de la contribution foncière sont nominatifs ; ils sont établis par les agents du Service des Contributions Diverses. Ils sont soumis aux Commissions des Contributions Diverses qui arrêtent les valeurs imposables. Toutes omissions au rôle primitif et toute insuffisances constatées en cours d’année peuvent être réparées par voie de rôle supplémentaire. Les rôles sont rendus exécutoires et mis en recouvrement conformément aux règlements en vigueur. La Contribution foncière des propriétés bâties est payable en un terme dans les trois mois de la mise en recouvrement des rôles. Lorsque les impositions sont comprises dans un rôle émis après le 15 octobre de l’année de l’exercice, les cotisations sont payables dans les trente jours qui suivent la mise en recouvrement du titre de perception. Les mutations de côtes foncières sont effectuées à la diligence des parties intéressées. Elles peuvent cependant être appliquées d’office dans les rôles par les agents chargés de l’assiette, d’après les documents certains dont ils ont pu avoir communication. Tant que la mutation de côte n’a pas été faite, l’ancien propriétaire continue à être imposé au rôle, ses ayants-droits ou ses héritiers naturels peuvent être contraints au paiement de la contribution foncière, sauf leur recours contre le nouveau propriétaire. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées comme en matière des contributions directes et conformément au régime financier de la République de Guinée. Elles ne sont recevables que si elles sont accompagnées de l’avertissement, d’un extrait du rôle, d’une sommation du Trésor, ou de toute autre pièce justificative.

Dr MAMADOU ALIOU BAH, Inspecteur Principal des Impôts

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