Alpha Condé en voie de régression ? (partie 2)

L'entretien d'Alpha Condé à la presse sénégalaise a porté sur plusieurs points. Dans cette
deuxième partie, ont été isolés les sujets à polémiques proprement dit, et les aspects
économiques dont les perspectives sont assez décevantes. Sur ce dernier point, il n'y a pas
de surprise, la vision dépassée d'un État interventionniste dans tous les secteurs ne nous
surprend guère. La philosophie est non pas de travailler à sortir le pays du marasme dans
lequel il se trouve, mais de vanter les possibilités minières du pays, aux fins de faire venir des
investisseurs étrangers.

Pour stopper les dérives verbales du président du RPG, une initiative sera proposée en
conclusion, pour permettre à la diaspora d'agir, donc d'intervenir dans les débats politiques
du pays. On ne veut pas nous ouvrir la grande porte (personne n'a parlé de nos suffrages
pour les législatives, et le nombre d'électeurs pour les présidentielles – à peine 100 000 – est
ridicule), eh bien nous allons passer par la porte de derrière (voir en conclusion).

Avant de conclure, il convient de reprendre la suite de l'interview d'Alpha Condé.

Sur le pseudo-attentat
« Voilà, des gens qui disent qu’ils sont politiciens et qui organisent des attentats contre le
Président de la République ».

Sauf erreur de ma part, jusqu'à présent seuls des militaires et quelques civils (non
politiciens) ont été arrêtés. On ignore donc d'où Alpha Condé tire ses informations !!!

« Ici, j’ai permis aux ambassades et à la Croix Rouge de leur rendre visite. J’ai demandé
aux populations de ne pas sortir ..., je ne veux pas de manifestation de soutien ».

Toutes les personnes arrêtées sont Guinéens. On ne voit donc pas ce que les ambassades,
qui défendent leurs ressortissants étrangers, ont à voir avec des Guinéens. Bizarrement la
Croix Rouge n'a fait aucun commentaire sur la santé des prisonniers. Les journalistes ne
font pas leur travail en ne questionnant pas les seuls habilités à rencontrer les prisonniers,
notamment pour vérifier la véracité de cette information.

Par ailleurs, l'ambassadeur de France est mal placé pour nous faire un compte-rendu de l'état
sanitaire des prisonniers, alors qu'il est scandaleusement complice de cette supercherie.

De toute façon, on a du mal à imaginer pourquoi la population ferait des manifestations
de soutien à des assassins, s'ils étaient réellement des assassins. Le fait-elle pour Claude
Pivi et Tiegboro Camara ? Tout le monde serait solidaire de son président, si c'était la
réalité. Imaginer que la population puisse contester des sanctions contre des criminels, c'est
reconnaître à demi-mot la supercherie.

« Vous ne pouvez pas dialoguer avec des gens qui veulent la guerre civile en Guinée ».

Qui veut la guerre civile ? Où cela a t-il été déclaré, suscité ou même évoqué ? Comme
les adversaires d'Alpha Condé sont notamment Sidya Touré et Cellou Dalein Diallo, et
qu’il les a rencontrés ou est en passe de le faire (l'épisode du refus de CDD n'étant qu'une
péripétie liée à la forme), on a du mal à comprendre qui sont ces gens qui veulent la guerre
civile. Les militaires ? Alpha Condé n'est-il pas Ministre de la défense ? Ne dialogue t-il pas

continuellement avec eux ?

« Nous savons très bien que le numéro deux de l’UFDG, Bah Oury qui a fui, a été un des
principaux organisateurs, de l’intérieur. Je n’ai pas voulu qu’on l’arrête. J’ai demandé
qu’on attende que la justice lance un mandat. Ce qui lui a permis de fuir. On a dit partout
que je l’ai tué. Après, il a parlé sur RFI. Lui-même, a dit qu’il ne pouvait pas ne pas agir. Il
a avoué. C’est le numéro deux officiel de l’UFDG, sans compter ceux qui se réunissaient à
Dakar, à l’hôtel Méridien-Président ».

Cette accusation est grave pour deux raisons : d'abord sur le plan juridique, Alpha Condé
démontre une fois de plus qu'il n'est pas juriste, malgré des études de droit il y a plus de
40 ans. Comment Bah Oury a t-il été impliqué dans cette affaire ? Officieusement lorsque
les prisonniers ont parlé, des rumeurs ont laissé entendre la participation – comme
commanditaires – des leaders de l'UFDG. En admettant que ces rumeurs proviennent bien
des prisonniers, cela signifie que le secret de l'instruction a été violé. Il suffit de trouver
l'auteur de ces rumeurs pour éventuellement faire annuler toute la procédure pour violation
du secret de l'instruction. De la même manière, lorsqu'Alpha Condé indique que Bah Oury
a avoué. Ou il tire cette information de l'instruction, prouvant à tous la dépendance de la
justice par rapport au pouvoir politique, et accessoirement violation du secret. Ou il tire
l'aveu de l'interview de Bah Oury sur RFI. Dans cette dernière hypothèse, il prouve qu'il ne
comprend pas le français. Être obligé de disparaître ne signifie pas qu'il a quelque chose à
se reprocher, mais que s'il ne disparaît pas, il sera arrêté pour rien. Alpha Condé disait que
le 19 Juillet, il n'a pas voulu qu'on l'arrête. Les militaires qui ont dévasté sa maison venaient
sans doute le saluer. Comment arrêter un politique par anticipation, alors qu'aucun militaire
et même civil, ceux-là même qui accuseront par la suite Bah Oury, n'ont pas encore été
arrêtés. Comment savoir qui est derrière cette mascarade, alors que personne n'a encore
d'information sur l'identité des différents protagonistes ?

Toutes ces incohérences sur ce pseudo-attentat – je les ai évoqué dans trois textes différents
– montrent à souhait la supercherie, qui n'a pour unique but, que de se débarrasser
d'adversaires qu'Alpha Condé considère comme gênants. Sur le plan politique, Alpha Condé
s'en prend à Bah Oury, s'imaginant qu'en décapitant une des têtes les plus remuantes de
l'UFDG, il sera tranquille. Il n'a encore rien vu. Nous sommes en 2011, et rien de ce qui s'est
passé il y a cinquante ans ne se reproduira en Guinée.

La complicité de pays amis
« Quand je prends l’exemple de Tibou Camara, sa femme est la sœur de la femme de Yaya
Jammeh. Tibou Camara a quand même dit, à Malabo que l’armée va marcher sur le palais.
Demandez aux Guinéens qui sont en Guinée Equatoriale, ils pourront vous dire ce que
Tibou Camara a dit contre moi ».

La honte à l'état pur : un PRG qui se fie à des propos de comptoirs de cafés du commerce,
à des ragots, pour considérer que des individus faisant des déclarations hostiles, sont
coupables de crimes. Il y a vraisemblablement plus de la moitié des Guinéens qui tiennent
aujourd'hui des propos hostiles à Alpha Condé. Peut-être certains rêvent même de le faire
quitter la présidence. Est-ce à dire qu'il faut arrêter tous ces Guinéens ou accuser tous les
pays qui accueillent ces ressortissants comme complices d'un coup d'État ?

Compte-tenu de ses fonctions, Alpha Condé ne peut pas dire n'importe quoi, et s'il le fait,
il doit en apporter la preuve. En se substituant à la justice guinéenne pour condamner des
présumés innocents de « l’attaque imaginaire » de son domicile (Bah Oury, Tibou Kamara,
Sadaka Diallo) puis le Sénégal et la Gambie, il devient tout simplement grotesque, pire, il
nous fait honte.

« J’ai clairement dit aux Ministres (des Affaires Etrangères du Sénégal et de la Gambie),
que j’estime que les choses ont été préparées à l’hôtel Méridien Président, à Dakar, et qu’il y
a eu des va-et-vient entre Dakar et Banjul. J’estime que les choses ne pouvaient pas se faire
à leur insu. J’ai dit à votre Ministre des Affaires étrangères de façon claire, que je pense
qu’il y a eu une complicité du gouvernement du Sénégal et de la Gambie …
Sadaka Diallo disait à qui voulait l’entendre, qu’il allait organiser une attaque contre moi ».

Des citoyens font des déclarations privées dans un hôtel où tout le monde passe, ils vont et
viennent entre différents pays. Deux pays souverains seraient complices (de quoi ? tentative
d'assassinat ?) pour cette raison. Le Président du RPG est tombé bien bas, deviendrait-il
sénile ?

Doit-on accuser Alpha Condé de complicité de crimes contre l'humanité, pour ne pas avoir
arrêté et déféré des criminels qui sont accusés par la CPI ? C'est pourtant de la même veine.

Ses accusations sans preuves, ni fondements, basées sur des insinuations, des supputations
et des calomnies sont scandaleuses. En Afrique en général, en Guinée en particulier, les
sondages n'existant pas, on procède par rumeurs pour étudier les réactions des uns et des
autres, et savoir si on doit faire marche arrière ou au contraire insister sur l'idée. Ici en
revanche, Alpha Condé a accusé nommément sans employer le conditionnel, ce qui laisse
supposer que les PV d'audition lui ont été communiqués, entrainant par là-même violation
du secret de l'instruction. C'est paradoxalement une bonne nouvelle.... pour les inculpés.

Qui ignorait que la justice guinéenne n'était pas libre et indépendante ? Comment imaginer
que les magistrats en charge du dossier ne vont pas être tenus par ces oukases présidentiels ?
Bien que présumés innocents, ils sont déjà virtuellement condamnés, puisque je ne connais
aucun Guinéen qui prendra le risque d’aller dans un sens différent de la volonté du PRG.

Sur les aspects économiques
« On dit que la Guinée c’est un scandale agricole. Ma priorité aujourd’hui, c’est
l’autosuffisance alimentaire. Que la Guinée n’importe plus de riz ! Mieux, nous voulons
devenir exportateur ».
Le problème a déjà été évoqué. Lorsqu'on a cette priorité, on ne subventionne pas le riz
importé, et on reste rigoureux sur le suivi des décisions (quid de l'affaire des semences ?)

« Le deuxième axe, c’est la santé et l’électricité. J’ai donné 110 millions de $ pour le barrage
du Delta. En même temps, nous avons commencé trois mini-barrages, que nous avons
nous-mêmes financés. Ensuite nous allons reconstruire Conakry ».
Rien d'indiqué pour la santé. D'où viennent ces 110 millions de $ ? Des 700 millions de Rio
Tinto ? Des 150 millions de l'Angola ?

A la question de savoir si le patronat local sera mis à contribution, Alpha Condé déclare : «
Moi, j’ai mon objectif et des hommes d’affaires ». Or ce ne sont pas des hommes d'affaires
que nous cherchons, il y en a 10 millions, mais des entrepreneurs.

« Notre défi est de changer le secteur informel productif en PME ».
Si c'est un objectif logique à moyen terme, en revanche on voit bien là la volonté
gouvernementale de tout contrôler et de racketter. La priorité ce n'est pas de financer l'État,
mais de créer des emplois. Il vaut mieux de nombreuses entreprises informelles créatrices
d'emplois, que des PME qui ne verront jamais le jour, parce que les entrepreneurs de
l'informel sont des hommes d'action et non des spécialistes de la paperasserie. Les raisons
de l'informel ne sont pas la volonté de rester en dehors de l'État, mais le fait que la fonction

publique rackette systématiquement, et sans pédagogie sur la politique fiscale.

A la question de savoir quelles actions Alpha Condé compte t-il entreprendre pour que cette
richesse minière potentielle profite à la Guinée et aux Guinéens, Alpha Condé déclare : « On
a mis en place un nouveau code minier ».
On nous vend du papier comme la solution à tous nos problèmes, mais le Code n'est qu'un
bout de papier. Quand bien même, nous possèderions 35% d'actions, si la société minière ne
fait pas de bénéfices, et il est très facile légalement de ne pas en faire, cela ne rapportera rien
à l'État. Est-il besoin de rappeler que dans le projet de Sangarédi, la Guinée a eu à posséder
jusqu'à 49%. Les Guinéens en ont-ils profité pour autant ?

« Les infrastructures aéroportuaires, ferroviaires et routières doivent appartenir
désormais à la Guinée ».
Oui, mais on n'est pas obligé de se lier les mains aussitôt pour immobiliser l'argent, juste
pour être propriétaire d'infrastructures dont le seul client risque d'être dans un premier
temps, la société minière. Ce n'est pas de l'investissement actif, mais un investissement de
rentier.

« La Guinée elle même doit avoir la possibilité de commercialiser une partie de la
production correspondant à sa part dans le capital ».
On a du mal à voir l'intérêt sauf pour l'aluminium (que nous ne possédons pas et dont aucun
projet n'a été évoqué), alors que pour le fer, la Chine (actionnaire de Rio Tinto) est le premier
client mondial, donc fixe quasiment les prix d'achat. Pourquoi les Chinois achèteraient-ils le
fer guinéen directement à la Guinée, alors que cela leur coûtera moins cher via Rio Tinto ?

« Nous pouvons vendre à qui nous voulons une partie de nos actions ».
Dans quel but, pour faire une plus value ? Là encore, une économie de rente et de coups.
Pourquoi vouloir contrôler jusqu'à 35% des actions, si le seul but n'est que de les vendre
ensuite ?

« Le DGA et le DRH doivent être des Guinéens et au bout de cinq ans le DG doit être
Guinéen ».
On a déjà connu ce genre de dispositions, et cela n'a pas fait avancer la Guinée. Ce ne sont
pas quelques postes, donnés d'ailleurs sans considération de compétences, qui permettront
à la Guinée de s'en sortir. Ce sont des transferts de compétence à tous les niveaux qui sont
nécessaires, de façon à être capable de contrôler toute la filière, au niveau productif. La
Guinée devrait être capable de maitriser la totalité de la filière aluminium pour des raisons
simples. Elle possèderait les 2/3 des réserves mondiales. Pourquoi doit-elle se contenter
d'obtenir quelques postes dans une filière contrôlée par d'autres ? En 50 ans, nous en
sommes toujours au même point, avec les mêmes ambitions minimalistes.

A la question de savoir s'il était prêt à sacrifier un peu de liberté, Alpha Condé déclare : «
Non je pense que le développement ne peut pas aller sans liberté ».
Alpha Condé est tellement risible qu'il n'est pas besoin de commenter. Probablement parle t-
il de la liberté de la Guinée, mais non de la liberté des Guinéens.

A la question de savoir s'il allait conserver le franc guinéen ou opérer un changement, Alpha
Condé déclare : « Pour le moment mon problème c’est d’avoir des autorités qui permettront
l’annulation de 2,4 milliards de $ sur une dette 3,1 milliards ».
En premier lieu, la dette dépasse les 3,5 milliards de $ (voire même les 3,7 milliards avec le
prêt angolais). En deuxième lieu, il existe des contradictions entre ce que la Guinée déclare
faire au FMI, et ce qu'elle fait réellement. Cela lui éclatera donc à la figure. Enfin, j'avais
cru comprendre qu'Alpha Condé était africaniste. Pourquoi laisse t-il donc supposer que la
Guinée pourrait intégrer la zone CFA ?

Conclusion

Alpha Condé est intellectuellement malhonnête, ceux qui en doutent n'ont qu'à comparer ce
qu'il dit et ce qu'il fait. Son discours à l'ONU en constitue une autre illustration. Mais comme
il fait de nombreuses erreurs, il va être temps de le mettre devant ses contradictions. Et
comme l'opposition préfère utiliser les armes politiques aux possibilités juridiques, il s'agit
de montrer à tous, que pour parvenir à un État de droit, il faut mettre tous les acteurs devant
leurs responsabilités :
− le gouvernement d'abord, qui viole allègrement les textes alors qu'il est censé les
défendre ;
l'opposition qui ne rassure pas davantage, en n'utilisant pas la possibilité de saisir

les tribunaux. Il est vrai que les Guinéens sont souvent confrontés à des décisions
incohérentes, voire à des dénis de justice (dans le cas de Zakariou Diallo par exemple),
mais l'opposition doit montrer qu'elle se comporterait différemment si elle était au
pouvoir ;
− la justice au sens large, qui devra montrer si le changement annoncé signifie
régression ou amélioration.

Pour ce faire, il convient de mettre ce régime au pied du mur, et de permettre au président
du RPG, de prouver ce qu'il dit. La diaspora va donc être mise à contribution, en montrant
sa détermination à mettre en place au pays un État de droit, par des initiatives ponctuelles,
mais concrètes.

Faute de pouvoir investir dans un pays qui ne respecte pas les règles, qui expulse des
citoyens de leurs demeures malgré un titre de propriété, qui ne permet pas à la diaspora de
s'exprimer, il est temps de prendre notre place.

Pour être concret, et ne pas se limiter à des discours, je propose donc à la diaspora la plus
élargie possible, d'être un acteur des débats politiques du pays. Pour ce faire, je vais contacter
un avocat français spécialiste de l'Afrique, en vue de lui demander d'assister ses collègues
guinéens, ceux qui seront affectés à la défense des civils enfermés à la suite du pseudo-
attentat du 19 Juillet.

Bizarrement on n'entend plus parler de cette affaire, pourtant des gens sont enfermés, sans
avoir pu obtenir l'assistance d'un avocat, et contrairement à ce que les ministres de la justice
et de la décentralisation proclamaient : « le droit sera respecté dans cette affaire ».

Ils vont donc avoir l'occasion de le montrer concrètement. Il faut être clair, au-delà de
la compétence de ce spécialiste, qui pourra mettre à nu les nombreuses violations de la
procédure, et de prouver les nombreuses incohérences ayant entouré cette affaire, l'objectif
est de constituer en France une caisse de résonance aux évènements du pays. Entre les
discours du président du RPG à vocation externe, présentant la Guinée comme un pays
démocratique, en voie de mise en œuvre d'un État de droit, où les droits de l'Homme sont
respectés (voir discours à l'Assemblée Générale de l'ONU) et la réalité crue, il convient,
parallèlement à nos actions de lobbying, de faire cesser ces mensonges éhontés.

Cette initiative n'est que la première d'une série que nous mettrons en œuvre
progressivement et dans plusieurs domaines pour nous faire entendre, et pour peser sur
l'avenir du pays.

Je vous recontacterai prochainement pour examiner les modalités pratiques, nous
permettant de nous mettre en marche collectivement.L'entretien d'Alpha Condé à la presse sénégalaise a porté sur plusieurs points. Dans cette
deuxième partie, ont été isolés les sujets à polémiques proprement dit, et les aspects
économiques dont les perspectives sont assez décevantes. Sur ce dernier point, il n'y a pas
de surprise, la vision dépassée d'un État interventionniste dans tous les secteurs ne nous
surprend guère. La philosophie est non pas de travailler à sortir le pays du marasme dans
lequel il se trouve, mais de vanter les possibilités minières du pays, aux fins de faire venir des
investisseurs étrangers.

Pour stopper les dérives verbales du président du RPG, une initiative sera proposée en
conclusion, pour permettre à la diaspora d'agir, donc d'intervenir dans les débats politiques
du pays. On ne veut pas nous ouvrir la grande porte (personne n'a parlé de nos suffrages
pour les législatives, et le nombre d'électeurs pour les présidentielles – à peine 100 000 – est
ridicule), eh bien nous allons passer par la porte de derrière (voir en conclusion).

Avant de conclure, il convient de reprendre la suite de l'interview d'Alpha Condé.

Sur le pseudo-attentat
« Voilà, des gens qui disent qu’ils sont politiciens et qui organisent des attentats contre le
Président de la République ».

Sauf erreur de ma part, jusqu'à présent seuls des militaires et quelques civils (non
politiciens) ont été arrêtés. On ignore donc d'où Alpha Condé tire ses informations !!!

« Ici, j’ai permis aux ambassades et à la Croix Rouge de leur rendre visite. J’ai demandé
aux populations de ne pas sortir ..., je ne veux pas de manifestation de soutien ».

Toutes les personnes arrêtées sont Guinéens. On ne voit donc pas ce que les ambassades,
qui défendent leurs ressortissants étrangers, ont à voir avec des Guinéens. Bizarrement la
Croix Rouge n'a fait aucun commentaire sur la santé des prisonniers. Les journalistes ne
font pas leur travail en ne questionnant pas les seuls habilités à rencontrer les prisonniers,
notamment pour vérifier la véracité de cette information.

Par ailleurs, l'ambassadeur de France est mal placé pour nous faire un compte-rendu de l'état
sanitaire des prisonniers, alors qu'il est scandaleusement complice de cette supercherie.

De toute façon, on a du mal à imaginer pourquoi la population ferait des manifestations
de soutien à des assassins, s'ils étaient réellement des assassins. Le fait-elle pour Claude
Pivi et Tiegboro Camara ? Tout le monde serait solidaire de son président, si c'était la
réalité. Imaginer que la population puisse contester des sanctions contre des criminels, c'est
reconnaître à demi-mot la supercherie.

« Vous ne pouvez pas dialoguer avec des gens qui veulent la guerre civile en Guinée ».

Qui veut la guerre civile ? Où cela a t-il été déclaré, suscité ou même évoqué ? Comme
les adversaires d'Alpha Condé sont notamment Sidya Touré et Cellou Dalein Diallo, et
qu’il les a rencontrés ou est en passe de le faire (l'épisode du refus de CDD n'étant qu'une
péripétie liée à la forme), on a du mal à comprendre qui sont ces gens qui veulent la guerre
civile. Les militaires ? Alpha Condé n'est-il pas Ministre de la défense ? Ne dialogue t-il pas

continuellement avec eux ?

« Nous savons très bien que le numéro deux de l’UFDG, Bah Oury qui a fui, a été un des
principaux organisateurs, de l’intérieur. Je n’ai pas voulu qu’on l’arrête. J’ai demandé
qu’on attende que la justice lance un mandat. Ce qui lui a permis de fuir. On a dit partout
que je l’ai tué. Après, il a parlé sur RFI. Lui-même, a dit qu’il ne pouvait pas ne pas agir. Il
a avoué. C’est le numéro deux officiel de l’UFDG, sans compter ceux qui se réunissaient à
Dakar, à l’hôtel Méridien-Président ».

Cette accusation est grave pour deux raisons : d'abord sur le plan juridique, Alpha Condé
démontre une fois de plus qu'il n'est pas juriste, malgré des études de droit il y a plus de
40 ans. Comment Bah Oury a t-il été impliqué dans cette affaire ? Officieusement lorsque
les prisonniers ont parlé, des rumeurs ont laissé entendre la participation – comme
commanditaires – des leaders de l'UFDG. En admettant que ces rumeurs proviennent bien
des prisonniers, cela signifie que le secret de l'instruction a été violé. Il suffit de trouver
l'auteur de ces rumeurs pour éventuellement faire annuler toute la procédure pour violation
du secret de l'instruction. De la même manière, lorsqu'Alpha Condé indique que Bah Oury
a avoué. Ou il tire cette information de l'instruction, prouvant à tous la dépendance de la
justice par rapport au pouvoir politique, et accessoirement violation du secret. Ou il tire
l'aveu de l'interview de Bah Oury sur RFI. Dans cette dernière hypothèse, il prouve qu'il ne
comprend pas le français. Être obligé de disparaître ne signifie pas qu'il a quelque chose à
se reprocher, mais que s'il ne disparaît pas, il sera arrêté pour rien. Alpha Condé disait que
le 19 Juillet, il n'a pas voulu qu'on l'arrête. Les militaires qui ont dévasté sa maison venaient
sans doute le saluer. Comment arrêter un politique par anticipation, alors qu'aucun militaire
et même civil, ceux-là même qui accuseront par la suite Bah Oury, n'ont pas encore été
arrêtés. Comment savoir qui est derrière cette mascarade, alors que personne n'a encore
d'information sur l'identité des différents protagonistes ?

Toutes ces incohérences sur ce pseudo-attentat – je les ai évoqué dans trois textes différents
– montrent à souhait la supercherie, qui n'a pour unique but, que de se débarrasser
d'adversaires qu'Alpha Condé considère comme gênants. Sur le plan politique, Alpha Condé
s'en prend à Bah Oury, s'imaginant qu'en décapitant une des têtes les plus remuantes de
l'UFDG, il sera tranquille. Il n'a encore rien vu. Nous sommes en 2011, et rien de ce qui s'est
passé il y a cinquante ans ne se reproduira en Guinée.

La complicité de pays amis
« Quand je prends l’exemple de Tibou Camara, sa femme est la sœur de la femme de Yaya
Jammeh. Tibou Camara a quand même dit, à Malabo que l’armée va marcher sur le palais.
Demandez aux Guinéens qui sont en Guinée Equatoriale, ils pourront vous dire ce que
Tibou Camara a dit contre moi ».

La honte à l'état pur : un PRG qui se fie à des propos de comptoirs de cafés du commerce,
à des ragots, pour considérer que des individus faisant des déclarations hostiles, sont
coupables de crimes. Il y a vraisemblablement plus de la moitié des Guinéens qui tiennent
aujourd'hui des propos hostiles à Alpha Condé. Peut-être certains rêvent même de le faire
quitter la présidence. Est-ce à dire qu'il faut arrêter tous ces Guinéens ou accuser tous les
pays qui accueillent ces ressortissants comme complices d'un coup d'État ?

Compte-tenu de ses fonctions, Alpha Condé ne peut pas dire n'importe quoi, et s'il le fait,
il doit en apporter la preuve. En se substituant à la justice guinéenne pour condamner des
présumés innocents de « l’attaque imaginaire » de son domicile (Bah Oury, Tibou Kamara,
Sadaka Diallo) puis le Sénégal et la Gambie, il devient tout simplement grotesque, pire, il
nous fait honte.

« J’ai clairement dit aux Ministres (des Affaires Etrangères du Sénégal et de la Gambie),
que j’estime que les choses ont été préparées à l’hôtel Méridien Président, à Dakar, et qu’il y
a eu des va-et-vient entre Dakar et Banjul. J’estime que les choses ne pouvaient pas se faire
à leur insu. J’ai dit à votre Ministre des Affaires étrangères de façon claire, que je pense
qu’il y a eu une complicité du gouvernement du Sénégal et de la Gambie …
Sadaka Diallo disait à qui voulait l’entendre, qu’il allait organiser une attaque contre moi ».

Des citoyens font des déclarations privées dans un hôtel où tout le monde passe, ils vont et
viennent entre différents pays. Deux pays souverains seraient complices (de quoi ? tentative
d'assassinat ?) pour cette raison. Le Président du RPG est tombé bien bas, deviendrait-il
sénile ?

Doit-on accuser Alpha Condé de complicité de crimes contre l'humanité, pour ne pas avoir
arrêté et déféré des criminels qui sont accusés par la CPI ? C'est pourtant de la même veine.

Ses accusations sans preuves, ni fondements, basées sur des insinuations, des supputations
et des calomnies sont scandaleuses. En Afrique en général, en Guinée en particulier, les
sondages n'existant pas, on procède par rumeurs pour étudier les réactions des uns et des
autres, et savoir si on doit faire marche arrière ou au contraire insister sur l'idée. Ici en
revanche, Alpha Condé a accusé nommément sans employer le conditionnel, ce qui laisse
supposer que les PV d'audition lui ont été communiqués, entrainant par là-même violation
du secret de l'instruction. C'est paradoxalement une bonne nouvelle.... pour les inculpés.

Qui ignorait que la justice guinéenne n'était pas libre et indépendante ? Comment imaginer
que les magistrats en charge du dossier ne vont pas être tenus par ces oukases présidentiels ?
Bien que présumés innocents, ils sont déjà virtuellement condamnés, puisque je ne connais
aucun Guinéen qui prendra le risque d’aller dans un sens différent de la volonté du PRG.

Sur les aspects économiques
« On dit que la Guinée c’est un scandale agricole. Ma priorité aujourd’hui, c’est
l’autosuffisance alimentaire. Que la Guinée n’importe plus de riz ! Mieux, nous voulons
devenir exportateur ».
Le problème a déjà été évoqué. Lorsqu'on a cette priorité, on ne subventionne pas le riz
importé, et on reste rigoureux sur le suivi des décisions (quid de l'affaire des semences ?)

« Le deuxième axe, c’est la santé et l’électricité. J’ai donné 110 millions de $ pour le barrage
du Delta. En même temps, nous avons commencé trois mini-barrages, que nous avons
nous-mêmes financés. Ensuite nous allons reconstruire Conakry ».
Rien d'indiqué pour la santé. D'où viennent ces 110 millions de $ ? Des 700 millions de Rio
Tinto ? Des 150 millions de l'Angola ?

A la question de savoir si le patronat local sera mis à contribution, Alpha Condé déclare : «
Moi, j’ai mon objectif et des hommes d’affaires ». Or ce ne sont pas des hommes d'affaires
que nous cherchons, il y en a 10 millions, mais des entrepreneurs.

« Notre défi est de changer le secteur informel productif en PME ».
Si c'est un objectif logique à moyen terme, en revanche on voit bien là la volonté
gouvernementale de tout contrôler et de racketter. La priorité ce n'est pas de financer l'État,
mais de créer des emplois. Il vaut mieux de nombreuses entreprises informelles créatrices
d'emplois, que des PME qui ne verront jamais le jour, parce que les entrepreneurs de
l'informel sont des hommes d'action et non des spécialistes de la paperasserie. Les raisons
de l'informel ne sont pas la volonté de rester en dehors de l'État, mais le fait que la fonction

publique rackette systématiquement, et sans pédagogie sur la politique fiscale.

A la question de savoir quelles actions Alpha Condé compte t-il entreprendre pour que cette
richesse minière potentielle profite à la Guinée et aux Guinéens, Alpha Condé déclare : « On
a mis en place un nouveau code minier ».
On nous vend du papier comme la solution à tous nos problèmes, mais le Code n'est qu'un
bout de papier. Quand bien même, nous possèderions 35% d'actions, si la société minière ne
fait pas de bénéfices, et il est très facile légalement de ne pas en faire, cela ne rapportera rien
à l'État. Est-il besoin de rappeler que dans le projet de Sangarédi, la Guinée a eu à posséder
jusqu'à 49%. Les Guinéens en ont-ils profité pour autant ?

« Les infrastructures aéroportuaires, ferroviaires et routières doivent appartenir
désormais à la Guinée ».
Oui, mais on n'est pas obligé de se lier les mains aussitôt pour immobiliser l'argent, juste
pour être propriétaire d'infrastructures dont le seul client risque d'être dans un premier
temps, la société minière. Ce n'est pas de l'investissement actif, mais un investissement de
rentier.

« La Guinée elle même doit avoir la possibilité de commercialiser une partie de la
production correspondant à sa part dans le capital ».
On a du mal à voir l'intérêt sauf pour l'aluminium (que nous ne possédons pas et dont aucun
projet n'a été évoqué), alors que pour le fer, la Chine (actionnaire de Rio Tinto) est le premier
client mondial, donc fixe quasiment les prix d'achat. Pourquoi les Chinois achèteraient-ils le
fer guinéen directement à la Guinée, alors que cela leur coûtera moins cher via Rio Tinto ?

« Nous pouvons vendre à qui nous voulons une partie de nos actions ».
Dans quel but, pour faire une plus value ? Là encore, une économie de rente et de coups.
Pourquoi vouloir contrôler jusqu'à 35% des actions, si le seul but n'est que de les vendre
ensuite ?

« Le DGA et le DRH doivent être des Guinéens et au bout de cinq ans le DG doit être
Guinéen ».
On a déjà connu ce genre de dispositions, et cela n'a pas fait avancer la Guinée. Ce ne sont
pas quelques postes, donnés d'ailleurs sans considération de compétences, qui permettront
à la Guinée de s'en sortir. Ce sont des transferts de compétence à tous les niveaux qui sont
nécessaires, de façon à être capable de contrôler toute la filière, au niveau productif. La
Guinée devrait être capable de maitriser la totalité de la filière aluminium pour des raisons
simples. Elle possèderait les 2/3 des réserves mondiales. Pourquoi doit-elle se contenter
d'obtenir quelques postes dans une filière contrôlée par d'autres ? En 50 ans, nous en
sommes toujours au même point, avec les mêmes ambitions minimalistes.

A la question de savoir s'il était prêt à sacrifier un peu de liberté, Alpha Condé déclare : «
Non je pense que le développement ne peut pas aller sans liberté ».
Alpha Condé est tellement risible qu'il n'est pas besoin de commenter. Probablement parle t-
il de la liberté de la Guinée, mais non de la liberté des Guinéens.

A la question de savoir s'il allait conserver le franc guinéen ou opérer un changement, Alpha
Condé déclare : « Pour le moment mon problème c’est d’avoir des autorités qui permettront
l’annulation de 2,4 milliards de $ sur une dette 3,1 milliards ».
En premier lieu, la dette dépasse les 3,5 milliards de $ (voire même les 3,7 milliards avec le
prêt angolais). En deuxième lieu, il existe des contradictions entre ce que la Guinée déclare
faire au FMI, et ce qu'elle fait réellement. Cela lui éclatera donc à la figure. Enfin, j'avais
cru comprendre qu'Alpha Condé était africaniste. Pourquoi laisse t-il donc supposer que la
Guinée pourrait intégrer la zone CFA ?

Conclusion

Alpha Condé est intellectuellement malhonnête, ceux qui en doutent n'ont qu'à comparer ce
qu'il dit et ce qu'il fait. Son discours à l'ONU en constitue une autre illustration. Mais comme
il fait de nombreuses erreurs, il va être temps de le mettre devant ses contradictions. Et
comme l'opposition préfère utiliser les armes politiques aux possibilités juridiques, il s'agit
de montrer à tous, que pour parvenir à un État de droit, il faut mettre tous les acteurs devant
leurs responsabilités :
− le gouvernement d'abord, qui viole allègrement les textes alors qu'il est censé les
défendre ;
l'opposition qui ne rassure pas davantage, en n'utilisant pas la possibilité de saisir

les tribunaux. Il est vrai que les Guinéens sont souvent confrontés à des décisions
incohérentes, voire à des dénis de justice (dans le cas de Zakariou Diallo par exemple),
mais l'opposition doit montrer qu'elle se comporterait différemment si elle était au
pouvoir ;
− la justice au sens large, qui devra montrer si le changement annoncé signifie
régression ou amélioration.

Pour ce faire, il convient de mettre ce régime au pied du mur, et de permettre au président
du RPG, de prouver ce qu'il dit. La diaspora va donc être mise à contribution, en montrant
sa détermination à mettre en place au pays un État de droit, par des initiatives ponctuelles,
mais concrètes.

Faute de pouvoir investir dans un pays qui ne respecte pas les règles, qui expulse des
citoyens de leurs demeures malgré un titre de propriété, qui ne permet pas à la diaspora de
s'exprimer, il est temps de prendre notre place.

Pour être concret, et ne pas se limiter à des discours, je propose donc à la diaspora la plus
élargie possible, d'être un acteur des débats politiques du pays. Pour ce faire, je vais contacter
un avocat français spécialiste de l'Afrique, en vue de lui demander d'assister ses collègues
guinéens, ceux qui seront affectés à la défense des civils enfermés à la suite du pseudo-
attentat du 19 Juillet.

Bizarrement on n'entend plus parler de cette affaire, pourtant des gens sont enfermés, sans
avoir pu obtenir l'assistance d'un avocat, et contrairement à ce que les ministres de la justice
et de la décentralisation proclamaient : « le droit sera respecté dans cette affaire ».

Ils vont donc avoir l'occasion de le montrer concrètement. Il faut être clair, au-delà de
la compétence de ce spécialiste, qui pourra mettre à nu les nombreuses violations de la
procédure, et de prouver les nombreuses incohérences ayant entouré cette affaire, l'objectif
est de constituer en France une caisse de résonance aux évènements du pays. Entre les
discours du président du RPG à vocation externe, présentant la Guinée comme un pays
démocratique, en voie de mise en œuvre d'un État de droit, où les droits de l'Homme sont
respectés (voir discours à l'Assemblée Générale de l'ONU) et la réalité crue, il convient,
parallèlement à nos actions de lobbying, de faire cesser ces mensonges éhontés.

Cette initiative n'est que la première d'une série que nous mettrons en œuvre
progressivement et dans plusieurs domaines pour nous faire entendre, et pour peser sur
l'avenir du pays.

Je vous recontacterai prochainement pour examiner les modalités pratiques, nous
permettant de nous mettre en marche collectivement.

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