Violences politiques en Guinée: au moins deux morts, une trentaine de blessés

CONAKRY (AFP) Au moins deux hommes ont été tués et une trentaine de personnes blessées mardi à Conakry lors de violences qui ont éclaté entre opposants et forces de l'ordre à la suite de l'interdiction d'un rassemblement de l'opposition guinéenne par le pouvoir du président Alpha Condé.

Sous couvert de l'anonymat, un médecin a affirmé à l'AFP avoir vu à la morgue de l'hôpital principal de Conakry "quatre corps" ainsi qu'une "trentaine de blessés", civils et membres des forces de l'ordre (gendarmes et policiers).

Un manifestant dont l'identité n'a pas été dévoilée a "été frappé et poignardé par des policiers" dans le quartier de Dar Es Salaam, un fief de l'opposition, ont affirmé les parents de la victime à une source hospitalière.

Auparavant, la famille de Mamadou Boye Barry, boulanger de 35 ans, avait annoncé sa mort en précisant qu'il avait été tué par balle à Bambeto, autre quartier acquis à l'opposition.

Duris Dialé Doré, ministre de la Communication, a confirmé deux décès, affirmant toutefois qu'ils étaient le résultat "d'affrontements entre manifestants". Il a ajouté que 32 gendarmes et un policier avaient été blessés.

Les affrontements ont opposé des partisans de l'opposition aux forces de l'ordre qui ont répliqué à des jets de pierres et de projectiles divers.

Ils ont éclaté après l'interdiction d'un rassemblement de l'opposition qui voulait protester contre l'organisation d'élections législatives le 29 décembre, date fixée selon elle "unilatéralement" par le pouvoir et la Commission électorale nationale indépendante (Céni).

L'opposition avait appelé à manifester au Stade du 28 septembre à Conakry, mais tous les accès avaient été bouclés par les forces de l'ordre, qui sont également intervenues dans d'autres quartiers pour empêcher les manifestants de converger vers le stade.

"Gouvernement entièrement responsable"

Le chef de l'opposition, Cellou Dalein Diallo, a rendu "entièrement responsable le gouvernement pour tout ce qui est arrivé".

"Nous ne manifestons pas contre telle ou telle personne", mais "contre les pratiques du gouvernement en particulier, contre l'exclusion, la non-association des autres partis à la définition des modalités et du calendrier des élections législatives", a affirmé M. Diallo à la presse.

La manifestation avait été interdite par le gouverneur de Conakry et une rencontre lundi entre le Premier ministre Mohamed Saïd Fofana et des représentants de l'opposition n'avait pas permis de débloquer la situation.

En demandant à M. Fofana de recevoir ses opposants, Alpha Condé entendait relancer "le dialogue politique" et préparer "dans les meilleurs délais" des élections législatives "transparentes et crédibles".

L'opposition craint un "hold-up" électoral de la part du pouvoir à l'occasion des législatives.

M. Condé, ex-opposant historique, a été élu en novembre 2010 lors de la première présidentielle démocratique de l'Histoire de la Guinée, mais ses opposants dénoncent, depuis, sa "dérive autoritaire".

Après l'attaque menée par des militaires le 19 juillet contre son domicile de Conakry, Alpha Condé, en dépit de l'enquête judiciaire en cours, avait accusé Amadou Bah Oury, numéro 2 du principal parti d'opposition, d'en avoir été l'un des cerveaux, avec la complicité du Sénégal et de la Gambie.

La France, ex-puissance coloniale, a appelé "au calme et à la retenue de tous" dans ce pays à l'histoire marquée par les violences politiques et ethniques.

L'interdiction du rassemblement de l'opposition a eu lieu la veille du second anniversaire du massacre à Conakry d'au moins 150 opposants le 28 septembre 2009, dans le même stade, par la junte militaire alors au pouvoir.

Cette date a été décrétée journée "de la réconciliation nationale" par Alpha Condé, mais aucun des auteurs supposés du massacre n'a, à ce jour, été inquiété.

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