L’ AFRIQUE ET SA CRISE: A Quand le Soulagement?

La crise africaine n’est pas seulement politique et sociale. Elle est aussi économique
et même culturelle. A part quelques rares pays qui semblent avoir pris dernièrement la
résolution de faire face, avec esprit de responsabilité, aux multiples défis qu’impose
leur développement, dans la majorité des pays africains au Sud du Sahara, c’est le
désespoir total. Comment en est-on arrive là? La réponse classique des leaders et certains
universitaires africains a toujours été de nier toute responsabilité des africains eux-mêmes
dans l’échec économique de l’Afrique et la crise sociale qui en a résulté. Ils ont toujours
blâmé les facteurs externes à l’Afrique tels que les termes défavorables des échanges
entre l’Afrique et l’Occident notamment, et ils situent l’origine de tout cela dans la traite
négrière, le colonialisme et le néo-colonialisme et autre France-Afrique. Un demi-
siècle environ après nos indépendances, peut-on encore continuer à situer l’origine de
nos maux uniquement dans la traite négrière, la colonisation et la néo-colonisation ?
Je ne crois pas. Si ces facteurs externes ne sont pas à exclure, la plus grande part de la
responsabilité de l’échec économique de l’Afrique et des crises sociales et politiques
qui la déchirent est à rechercher dans le comportement quotidien des africains et de
leurs leaders. La corruption endémique, la mal gouvernance, la gestion désastreuse des
ressources naturelles, les tendances dictatoriales des leaders africains, l’ethno- strategie,
etc. sont devenus les meilleurs candidats pour expliquer l’origine contemporaine de
l’échec économique et des crises politiques et sociales de l’Afrique.

Parlant des échanges de l’Afrique avec le reste du monde, les leaders africains doivent
savoir qu’ils sont en relation de pouvoir. Or qui dit relation de pouvoir dit influence,
et qui dit influence parle de contrôle de ressources négociables. On ne peut pas blâmer
les occidentaux ou le reste du monde d’aller chercher des ressources en Afrique pour
améliorer le bien être de sa population. Il appartient aux africains et à leurs leaders
d’apprécier à leur juste valeur les immenses ressources dont ils sont porteurs ; que
celles-ci soient humaines ou naturelles, en vue de tirer le meilleur bénéfice dans leur
négociation avec le reste du monde.

A quelque chose malheur est bon. La perte de la légitimité de l’état africain postcolonial
que nous vivons aujourd’hui à travers les différentes contestations n’est pas mauvaise en
soi. Elle découle en partie de la prise de conscience de la relativité de l’importance de
l’Etat. Les populations africaines doivent même aller au delà pour savoir une fois pour
toute que les gouvernements budgetivore n’apporteront pas la solution à leurs problèmes.
Déjà au 18e siècle, Jean Jacques Rousseau ne disait-il pas que l’homme public ne produit
pas ; il consomme. Il consomme le superflu des particuliers qui devient le nécessaire
du public. Mais dans le contexte africain, le nécessaire est d’abord à créer, sans parler
du superflu. Pour y arriver, l’Afrique a plusieurs exemples dans l’histoire récente de
l’humanité pour lui enseigner que le nécessaire et le superflu ne seront créés que par le
génie entrepreneurial des africains par la facilitations des gouvernants.
D’où l’importance de se pencher sur une redéfinition complète de l’Etat africain.
Il devrait être léger, très réduit, équilibré et fortement décentralisé. Les africains
individuellement pris doivent savoir que leur développement sera obligatoirement
synonyme de leur capacité à se prendre en charge plutôt que de compter sur la bienveillance des autres comme le leur enseignent certains de leur leaders.

Que faut-il faire?

Pour juguler les crises africaines, des changements importants doivent s’opérer à
plusieurs niveaux de la société. Une première vérité simple qu’il faut dire est que pour
que l’Afrique se développe, il faut qu’elle maitrise ses charges par rapports à ses moyens.
Ses charges doivent indispensablement être inferieures à ses moyens. Cela doit être le
cas à tous les niveaux. Au niveau des citoyens pris individuellement, la discipline et la
responsabilité doivent être au cœur de leurs vies quotidiennes. Ils doivent faire le deuil de
certaines habitudes qui sont à l’origine du cercle vicieux de la pauvreté.
Au niveau des gouvernements, il faut également insister sur la notion de responsabilité.
Il n’y a pas un seul gouvernement en Afrique dont le chapitre dépenses de son budget
n’est pas deux fois ou trois fois supérieur à celui des recettes. Il faut que cela finisse.
Les gouvernements doivent se montrer responsables dans la gestion et surtout rendre
des comptes à leurs citoyens. En plus, les gouvernements doivent se consacrer à leurs
missions essentielles et laisser le secteur privé s’occuper de l’activité économique. Il
faut rappeler que les missions essentielles d’un gouvernement sont de protéger la vie des
citoyens et leurs biens, de veiller au respect de l’égalité des chances entre les citoyens,
de mettre en place un environnement au sein duquel l’initiative individuelle et privée
peut prospérer, d’assurer la sécurité des frontières et d’offrir aux populations certains
services qui ne peuvent pas encore être offerts de manière plus efficiente et efficace par
des particuliers ou par le secteur privé.

Une seconde vérité simple qu’il faut dire est que pour que l’Afrique se développe, il
faut qu’elle construise son propre capital d’investissement. A ceux qui disent que les
africains ne peuvent épargner parce qu’ils sont pauvres, je dirai que, quelle que soit
l'importance du revenu d’un individu, pouvoir épargner tient plus à la capacité de gérer
efficacement ses finances personnelles. Le capital que devra se construire les africains
ne sera pas suffisant au début, mais la première bonne nouvelle est qu’il n’était pas
suffisant non plus au début partout dans le monde où il l’est aujourd’hui. La seconde
bonne nouvelle est que la construction du capital par l’Afrique pour son développement
signifiera que les africains sont désormais sérieux à propos de leur développement. Cela
voudra dire qu’individuellement et collectivement, les africains auront choisi d’être
exigeants envers eux-mêmes et envers leurs gouvernements. Les retombées immédiates
de cela seront une meilleure gestion individuelle et collective, un accroissement des
richesses, une véritable stabilité et un environnement propice à l’investissement.
Les politiques favorables à l’investissement de la part des gouvernements seront une
condition indispensable. La transparence, la protection de la propriété privée et la non-
discrimination seront des principes cardinaux de telles politiques d’investissement. Le
jour que cela sera possible en Afrique, les détenteurs de capitaux partout dans le monde
n’hésiteront plus à y investir.

Les gouvernements doivent prendre des mesures de promotion et de facilitation de
l’investissement, comme les incitations. Une politique fiscale saine permettra non
seulement de réaliser les objectifs des politiques publiques, mais de contribuer à la création des conditions favorables à l’investissement. La pratique d’une concurrence
saine permettra l’innovation et contribuera à l’établissement des conditions propres à
attirer de nouveaux investisseurs. Le développement des infrastructures et du secteur
financier, et la valorisation des ressources humaines par l’éducation et la formation
professionnelle permettront de bénéficier des délocalisations à la mode dans les pays
industrialisés.
En tout cas nous aussi nous pouvons changer les choses dans le bons sens et faire de
l’Afrique le centre non pas le centre des contestations et crises mais un centre des affaires
et de la Prosperite.
Que Dieu benice l’Afrique et les Africains: AMEN!

Amadou S Diallo
Depuis Washington DC.
Diallongr@yahoo.com

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