Semaine de solidarité internationale / Forum social de l'Est parisien

Samedi 26 novembre 2011 / Mairie du 20ème Arrondissement
Pavillon Carré de Baudouin, 121 rue de Ménilmontant, 75020 PARIS

Contribution de Nabbie Ibrahim SOUMAH :
La coopération décentralisée : enjeux et réalités


INTRODUCTION
« Au fur et à mesure des progrès économiques et technologiques, nous dépendons de plus en plus étroitement les uns des autres. Tout ce que nous faisons a une influence tôt ou tard, sur le reste du monde » souligne Tenzin Gyatso, 14ème Dalaï-lama et prix Nobel de la paix le 10 décembre 1989.
La solidarité est donc le fondement, le substratum de la coopération décentralisée définie comme « l’établissement de relations de long terme entre collectivités territoriales (régions, départements, communes et leurs groupements) formalisées par des conventions ». Celles-ci définissent les actions de coopération prévues et leurs modalités techniques et financières. La coopération peut prendre des formes diverses : aide au développement, appui institutionnel, gestion commune de biens et de services, coopération transfrontalière ou coopération interrégionale.
La belle idée de coopération décentralisée, d'aide au développement est prise aujourd'hui pour diverses raisons dans une aporie, est en proie à une contradiction majeure dont la résolution s'avère très problématique.
D'une part, on dispose d’une large palette de mécanismes innovants (dispositif institutionnel et autres organismes d’aide au développement) liés au développement.
D'autre part, le contexte international sur les plans financier et économique est défavorable, dégradé et non-encourageant avec une crise qui a eu raison de nombreux gouvernements sortants en Irlande, Portugal, Grèce, Italie et Espagne dans la zone de l'euro. C'est l'effet domino.
En effet, la coopération décentralisée subit elle aussi la crise. La rigueur budgétaire imposée par la finance internationale avec des coupes sombres (retraites, services publics, etc.), affecte inéluctablement les dotations financières initialement prévues pour l'aide au développement.
Mais la coopération décentralisée sud-sud reste une solution complémentaire, notamment avec à la rescousse, le concours de la BRICS (anciennement le BRIC), un acronyme anglais qui désigne le groupe de pays formé par le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud (South Africa).
Considérés comme des grandes puissances émergeantes, ils sont respectivement les 9e, 6e, 4e, 1re et 25e puissances économiques mondiales. Ils comptent 40% de la population mondiale et, en 2015, devraient assurer 61% de la croissance mondiale selon le FMI. Ces pays sont actuellement économiquement attractifs, et l'entrée au club intéresse des pays tels le Mexique, la Corée du Sud et la Turquie.

I) LA SOLIDARITE, FONDEMENT DE LA COOPERATION DECENTRALISEE

1°) Le jumelage ou la coopération par le bas avec les populations
Au moment où Internet diminue les distances et rapproche les hommes, le jumelage des villes de tous les pays du monde est l'une des tentatives les plus concrètes d'établir des liens d'amitié et de fraternité par-delà les frontières.
La fédération mondiale des cités unies, créée en 1957, organise le jumelage, qui est un instrument de culture humaine, indispensable à la rencontre entre les peuples, sans préoccupation partisane et sans exclusive.
Né en Europe au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le jumelage s'est voulu tout d'abord œuvre de réconciliation, notamment avec l'Allemagne, puis de paix avec les pays de l'Est pendant la guerre froide.
En France, le comité de jumelage est une association loi 1901 qui fonctionne avec les subventions allouées par le conseil municipal; il s'intéresse à toutes les formes d'activités : vie familiale, professionnelle, économique, commerçante, touristique, sportive, intellectuelle, culturelle, etc.
Le jumelage-réconciliation s'est réalisé dans beaucoup de villes, d'écoles, de régions, d'universités grâce au traité de l'Elysée signé le 22 janvier 1963 par le chancelier Konrad Adenauer (1876-1967) et Charles de Gaulle (1890-1970). Il avait fixé les objectifs d'une coopération accrue franco-allemande notamment dans les domaines des relations internationales, de la défense et de l’éducation.
Les jumelages de paix, pendant la Guerre froide entre l’Est et l’Ouest, les plus grands bénéficiaires furent les villes européennes.
Le jumelage-coopération est apparu dans les années 70 avec l'accès à l'indépendance des pays africains et l'émergence du Tiers-monde sur la scène internationale.

2°) Un cadre juridique, administratif et budgétaire singulier
C'est par le biais de la loi qu'est reconnue la capacité aux collectivités territoriales leur action en matière de coopération dans un cadre juridique, administratif et budgétaire précis et singulier.
La coopération transfrontalière est consacrée par l'article 65 de la loi Defferre n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions. Considérée comme l'acte I de la décentralisation, la loi de 1982 posait deux conditions restrictives et cumulatives pour la coopération entre départements ou régions françaises et structures comparables étrangères limitrophes ou non : la nécessité d'obtenir l'autorisation du gouvernement et l'obligation de limiter l'accord à la concertation et aux contacts réguliers. Elle ne tenait pas compte de la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière adoptée à Madrid le 21 mai 1980 dans le cadre du Conseil de l'Europe dont l'approbation ne fut autorisée que par la loi n°83-1132 du 23 décembre 1983 .
La loi d'orientation n°92-125 du 6 février 1992 relative à l’administration territoriale de la République pose enfin le principe que les collectivités territoriales et leurs groupements pourront désormais légalement conclure des conventions avec des collectivités territoriales étrangères et leurs groupements, dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la France.
L'article 131 de la loi du 6 février 1992 et l’article L. 1115-1de la loi du 25 janvier 2007 relative à l'action extérieure des collectivités territoriales et de leurs groupements évoquent la compétence des collectivités territoriales.
Les conventions transfrontalières entrent en vigueur dès leur transmission au représentant de l'Etat (Préfet) qui assure le contrôle de leur légalité dans les conditions du droit commun fixées par la loi du 2 mars 1982. Ce contrôle vise à s'assurer que :
- la convention ne comporte pas de dispositions qui pourraient lier d'autres collectivités territoriales non signataires ou l'Etat ;
- le signataire français est préalablement autorisé à conclure la convention par une délibération de l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale (ou du groupement) concernée.
La Convention est exécutoire après transmission au préfet et publication dans les conditions de droit commun.
En toutes circonstances, ce sont les collectivités territoriales, signataires de la convention, qui sont maître d’ouvrage du partenariat de coopération décentralisée.
La coopération repose ici dans un cadre territorial des collectivités territoriales, les liens interétatiques étant très lourds, pesants, lents, regardants. Toutefois, on tient compte des lois qui définissent et encadrent l’action des collectivités locales.

3°) Les mécanismes de la coopération décentralisée

a) Le dispositif institutionnel français d’aide au développement
Dans le cadre des célébrations en France du Cinquantenaire des indépendances africaines, la Délégation à l’action extérieure des collectivités territoriales (DAECT) du ministère des Affaires étrangères et européennes (MAEE) avait organisé le 25 novembre 2010 à la Cité de l'architecture et du patrimoine une table ronde sur le thème de « La coopération décentralisée entre l'Afrique et la France : 50 ans de dialogues et d'échanges pour le développement ».
Un trophée de la coopération décentralisée « Cinquantenaire des indépendances africaines » fut remis aux maires de 7 villes africaines et de 7 villes françaises.
Le dispositif d’aide publique au développement (APD) a été réformé en 2004 en vue de l’adapter aux nouveaux enjeux globaux et aux évolutions du paysage de l’aide.
Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, on a hiérarchisé les priorités afin de réévaluer l’allocation budgétaire et de rendre l’APD plus efficace.
Les instances et institutions du dispositif français d’APD sont nombreuses.
L’APD constitue une composante essentielle de l’action extérieure de la France.
Les orientations stratégiques sectorielles de la politique française d’aide publique au développement et les priorités géographiques sont définies par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID).
La mise en œuvre de l’APD fait appel à des partenaires ministériels : le MAEE, le ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi (MINEIE) et à un opérateur principal qu'est l’Agence Française de Développement (AFD).
Signés à partir de 2005, les Documents Cadres de Partenariat (DCP) sont des accords discutés entre la France et ses partenaires qui définissent pour 5 ans les secteurs de concentration de l’aide française dans chaque pays d’intervention de la Zone de Solidarité Prioritaire (ZSP) et dans les autres pays d’Afrique subsaharienne. Ils sont l’application du plan d’Action de la France en faveur de l’efficacité de l’aide.
Au sein du MAEE, la Direction générale de la Mondialisation, du Développement et des Partenariats (DGM) est chargée de la représentation du Ministère au sein du co-secrétariat du CICID, de la tutelle de l’AFD, des partenariats avec les organisations multilatérales et régionales, de la définition des actions de coopération en matière culturelle, d’enseignement supérieur, de recherche, d’audiovisuel, de nouvelles technologies de l’information et de la communication et de gouvernance démocratique. D’autres directions du MAEE interviennent dans l’élaboration de la politique française de développement : la Direction des Nations-Unies et des organisations internationales, la Direction de l’Union européenne et les Directions géographiques. L’AFD est responsable de la mise en œuvre des actions dans les secteurs de l’éducation, de la santé, de l’agriculture et de la sécurité alimentaire, des infrastructures, de l’eau et de l’assainissement, du secteur productif, de l’environnement, de la biodiversité et du soutien aux Organisations non-gouvernementales.
France Coopération Internationale (FCI) est un Groupement d’intérêt public crée en 2002 par le MAEE et placé sous la double tutelle de ce ministère et de celui de la fonction publique. FCI prend en charge l’expertise internationale et anime le réseau des opérateurs français publics et privés.

b) Les autres organismes d’aide au développement
Aux côtés de ce dispositif institutionnel, de nombreux acteurs français de la société civile et les collectivités territoriales interviennent dans la coopération pour le développement, notamment les OSI (Organisations de Solidarité Internationale)
Fondée il y a plus de 30 ans par Bernard Stasi (1930-2011), Cités Unies France (CUF) a été de tous les combats et de toutes les avancées en matière de coopération décentralisée franco-africaine. Elle a pu faire évoluer les pratiques et inspirer l’évolution législative, fédère les collectivités territoriales françaises engagées dans la coopération internationale.
CUF compte 500 adhérents et anime un réseau de 3 000 collectivités territoriales, engagés dans la coopération décentralisée. Une convention régulièrement renouvelée avec le MAEE lui donne mission d’animation et de coordination pour l’ensemble des collectivités territoriales engagées dans la coopération internationale. Elle forme un réseau unique de solidarité entre celles-ci et vers le monde.
L’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France et l’Association des régions de France sont membres de droit de son bureau exécutif.
Coordination SUD est la coordination nationale des ONG françaises de solidarité internationale. Elle rassemble 6 collectifs d'ONG et 140 ONG.
Soutenu par le Ministère de l’immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire (MIIINDS) et géré par le Forum des organisations de solidarité internationale issues des migrations (FORIM), le dispositif PRA/OSIM donne accès à un cofinancement pouvant atteindre 15 000 €. Le FORIM est une plate-forme nationale qui réunit des réseaux, des fédérations et des regroupements d'OSIM engagés dans des actions de développement ; il représente environ 600 associations intervenant en Afrique, en Asie et aux Caraïbes.
Le 4ème forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, qui se tiendra à Busan (Corée du Sud) du 29 novembre au 1er décembre 2011, sera le lieu de discussions sur l’efficacité des bailleurs, mais aussi sur celle de la contribution des organisations de la société civile au développement. Coordination SUD participera aux débats, en lien très étroit avec Concord (28 ONG) son équivalent européen, et BetterAid (environ 1700 organisations de développement issues de la société civile).

c) Les financements innovants au cœur du développement
Le projet de traité international du 28 octobre 2011 relatif à une taxe multilatérale et multi juridictionnelle sur les transactions financières est une vision innovante du développement ; élaborée par l’avocat belge Lieven Denys dans le cadre du « Groupe Pilote sur les financements innovants pour le développement ».
Cette notion, introduite dans le débat international au moment du sommet onusien sur le financement du développement de Monterrey (Mexique) du 7 mars 2002, désigne les mécanismes générant des ressources complémentaires à l’Aide publique au développement traditionnelle et présentant une plus grande prévisibilité.
Le Groupe Pilote, mis en place en 2006, rassemble 59 pays, de niveaux de développement divers et associe les principales organisations internationales (Banque Mondiale, OMS, UNICEF, UNDF notamment), ainsi que des ONG.
On note trois mécanismes de mobilisation de financement :
- l’initiative française d’une taxe sur les billets d’avion, concrétisée dans un dispositif d’action novateur comme UNITAID ;
- la Facilité internationale de financement pour la vaccination doit lever des milliards $ sur les marchés financiers afin de financer des programmes de vaccination des enfants et de renforcement des systèmes de santé menés par l’Alliance pour les vaccins et la vaccination (GAVI).
- et la Garantie d’achats futurs vise pour sa part à accélérer le développement de nouveaux vaccins contre le pneumocoque.
Ces trois mécanismes ont d’ores et déjà permis de mobiliser près de 2 milliards $ de financement et contribué à vacciner plus de 100 millions d’enfants par an et à garantir le traitement pédiatrique contre le sida de 100 000 enfants par an.
D’autres initiatives sont en cours et mobilisent les acteurs du développement comme la lutte contre l’évasion fiscale et les flux financiers illicites, la canalisation des transferts des migrants vers l’investissement productif ou social dans leur pays d’origine, la lutte contre le changement climatique en réservant au développement une partie des revenus tirés de la mise aux enchères des crédits carbone, le débat sur les taxes sur les transactions financières et les transactions de change, les contributions volontaires de solidarité, ou encore la solidarité numérique nourrissent en particulier leurs travaux.
La 9ème session plénière du groupe pilote sur les financements innovants pour la développement a eu lieu à Bamako (Mali) les 24 et 25 juin 2011.

II) LA COOPERATION DECENTRALISEE VICTIME DE LA CRISE

« Après nous, l'Europe sera dirigée par des comptables » prédisait avec justesse François Mitterrand (1916-1996).
En temps de crise, l'aide publique au développement (APD) souffre également de la rigueur budgétaire ; celle de la France aux pays du Sud est en baisse : elle se chiffre à près de 10 milliards €, soit 0,46% du revenu national brut. Avec pour objectif d'atteindre 17 milliards € (0,7%) en 2015, le gouvernement devrait relever ce taux à 0,5% dans le cadre du projet de loi de finances 2012.
Deux tiers de ces 10 milliards correspondent à de l'aide bilatérale, soit de l'argent directement prêté ou donné aux pays aidés, et « près de 60% de l’APD, tous instruments confondus, se portent en Afrique sub-saharienne », a déclaré le ministre chargé de la Coopération, Henri de Raincourt.
Sébastien Fourmy, porte-parole d’Oxfam France, en charge de la question de l’APD à Coordination SUD, a du mal à croire à une augmentation de son budget et réclame un « calendrier clair » de la part du gouvernement.
Une majeure partie des fonds consacrés à l’APD l'est sous forme de prêts. Le financement aux ONG ne représente, lui, que 1 à 2% du budget total. Une part largement inférieure à celle réservée aux associations dans les autres pays bienfaiteurs, selon Sébastien Fourmy qui rappelle que Nicolas Sarkozy s’était également engagé à doubler la part des ONG dans le budget de l’APD.
La France reste dans le trio de tête mondial en volume de dépenses ; loin derrière les Etats-Unis et juste après le Royaume-Uni qui ont respectivement consacré 30,2 et 13,8 milliards $ en 2010 selon le rapport annuel de l’OCDE publié en avril dernier.
Pour rappel, l’Union européenne (UE) est le premier bailleur d’aide au développement dans le monde avec près de 60 % du montant total de l’aide si l’on regroupe l’aide de l’UE et celle de ses États membres.

III) LA COOPERATION SUD-SUD : UNE SOLUTION COMPLEMENTAIRE

1°) La BRICS est à la rescousse

a) Le renforcement continu de la coopération sino-africaine
Cette coopération est devenue un composant majeur de la coopération décentralisée sud-sud. La 4eme réunion ministérielle du Forum sur la coopération sino-africaine à Charm el-Cheikh (Egypte) a eu lieu en novembre 2009.
Depuis 2000, le commerce sino-africain a augmenté à un taux de croissance annuelle de plus de 30% et en 2008 le volume total du commerce a dépassé 100 milliards $, atteint ainsi deux ans plus tôt que prévu l’objectif fixé par le Sommet de Beijing. Grâce à l’application du tarif douanier zéro aux produits venant des PMA africains, à l’organisation des expositions des produits africains, et à l’envoi des missions d’achats, la Chine a ouvert davantage son marché aux produits africains.
Un livre blanc sur la coopération sino-africaine, élaboré par le Bureau d'Information du Conseil d'Etat de Chine l’estime à 114,81 milliards $ en 60 ans.
Jusqu’à la fin de 2008, le stock des investissements directs en Afrique s’est chiffré à 7,8 milliards $. Malgré l’éclatement de la crise financière, la Chine a honoré ses engagements en Zambie. Lorsque les investisseurs occidentaux se sont retirés de ce pays en difficulté économique et le peuple massivement en chômage, les investisseurs chinois, n’ont licencié aucun ouvrier, mais en revanche, ils y ont augmenté leurs investissements, créant ainsi de nouveaux postes de travail.
Au niveau des infrastructures, la Chine s’est attachée à fournir des financements, comme des prêts sans intérêt ou préférentiels, des crédits acheteurs à l’exportation préférentiels, ou bien des prêts commerciaux destinés à soutenir la construction infrastructurelle. Ces projets ont joué un rôle de propulsion évidente pour le développement économique de ces pays.
La Chine a entraîné les autres pays à porter une attention sur l’Afrique.

b) La coopération Inde-Afrique : des enjeux politiques en filigrane
Le second sommet Afrique-Inde a eu lieu en mai 2011 à Addis-Abeba (Ethiopie).
L’Inde et l’Afrique ont un volume d’échanges de 56 milliards de dollars (contre 126,9 milliards d’échanges commerciaux entre l’Afrique et la Chine), avec des exportations africaines vers l’Inde principalement constituées de matières premières (le pétrole représente 63,5% de ces exportations).
Les prêts indiens seront principalement dirigés vers le secteur agricole, les nouvelles technologies, la formation et les communications.
Parallèlement au volet économique, les enjeux politiques ont également été abordés lors de la rencontre éthiopienne. La volonté de New Delhi de devenir un membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU et l’importance de l’adhésion des dirigeants africains à cette proposition ont particulièrement été mis en avant. La « déclaration d’Addis-Abeba » souligne « que les Nations-Unies doivent fonctionner de façon transparente, efficace et que la composition de ses organes centraux doit refléter les réalités d’aujourd’hui ».
Une contrepartie essentielle de l'aide indienne est donc éminemment politique en filigrane : c'est en réalité un partenariat gagnant-gagnant.

2°) Le forum de coopération Afrique-Amérique du Sud (ASA)
Créé lors d'un sommet de chefs d'Etat en novembre 2006 à Abuja (Nigeria) puis tenu en septembre 2009 sur l'île de Margarita (Venezuela), la 3ème réunion consacrée au renforcement de la coopération entre les deux régions, aura lieu le 28 novembre 2011 à Malabo (Guinée Equatoriale).
C'est un cadre de coopération Sud-Sud pour un partage de compétences et d'expériences dans divers domaines (commerce, agriculture, énergie, éducation, sport, etc.).Les racines africaines sont aussi fortes que les racines hispaniques dans la construction de l’identité culturelle en Amérique du Sud.

3°) Intégration régionale africaine et coopération décentralisée
Deux localités ouest africaines, situés au Burkina Faso et au Ghana ont décidé de coopérer afin de trouver une solution au problème de commercialisation de la tomate dont souffrent les producteurs des deux côtés de la frontière.
La Région de l’Upper East au Ghana (Est du pays) et la Province Centre-Sud du Burkina Faso, ont ainsi décidé d’établir un partenariat.
La décision a été prise, par le ministre « régional » ghanéen, Mark Woyongo et le burkinabé Raymond Edouard Ouedraogo, gouverneur de la province centre-sud, d’un commun accord avec les producteurs des deux pays.
Jusque-là les initiatives en matière de coopération décentralisée en Afrique donnent la priorité aux collectivités locales des pays développés du Nord et se font souvent sur la base d’aides ou de subventions attendues de ces collectivités des pays riches.
La culture de la tomate utilise une forte main d’œuvre dans les deux pays et entre 2008 et 2009 le Ghana a importé 6.562 tonnes de tomate du Burkina Faso.
Pour les deux parties, unir leurs efforts et leur expérience au sein d’un partenariat constitue le seul moyen d’apporter véritablement une solution au problème de la commercialisation de la tomate.
Pour mieux réussir leur projet, les deux parties ont plaidé pour une « contribution des chercheurs » pour la fourniture de variétés de tomates plus « adaptées au climat de la savane afin d’assurer des récoltes tout au long de l’année ». Elles ont également réclamé un meilleur accès aux crédits et le respect du principe de « libre circulation » des personnes et des biens, conformément aux règles édictées par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest dont les deux pays sont membres.

CONCLUSION
La coopération décentralisée en Afrique de l’Ouest est prise dans une aporie, une contradiction irréductible. La démarche caritative naïve des édiles des communes françaises désireuses d’agir mais fort peu préparées à le faire, entraîne sur le terrain des nécessités d’intermédiations par des courtiers, édiles et notables locaux. Ce holisme local est lié à la « tradition hiérarchique ».
Les communes françaises chercheront général-ement à réformer leur aide en la « professionnalisant ». Elles confient alors la tâche de mettre en place un système d’appui fiable et plus juste à un maître d’œuvre tiers comme l'association Française des Volontaires du Progrès fut créée (AFVP) créée en 1963 à l'initiative du Général de Gaulle. Cette association puise dans le répertoire des outils d’appui en matière de développement local et propose la mise en place d’accompagnements institutionnels (Projets de développement local) ou plus récemment de fonds d’investissement locaux (Programmes d’appui au développement local) inspirés du modèle rodé par la coopération française bilatérale dans les années 1990 au Mali et au Burkina Faso. Par rapport aux projets classiques, cet outil permet d’obtenir un bon ratio investissement/fonctionnement : les bailleurs ont la certitude de voir leur argent utilisé pour l’aide aux populations plutôt que dans les frais de gestion.
Les financements de « dossiers collectifs » à l’échelle du village ou du quartier (écoles, logements d’instituteurs, forages, centres d’alphabétisation, constitution de groupements, etc.) permettent de rationaliser la coopération décentralisée.
Mais les sociétés locales sont, de très longue tradition, autoritaires et hiérarchiques, et les contextes nationaux favorables à des réinterprétations conservatrices du processus démocratique, donc très réticentes au greffage de dispositifs démocratiques.
L'urgence demeure donc dans la bonne gouvernance, notamment mettre fin aux dérives bureaucratiques et notabiliaires du développement local en Afrique.
C’était le cheval de Feu Ibrahima Naby Diakité (1964-2009) ex-ministre de la décentralisation et du développement local qui avait été le premier à conceptualiser le développement local et son corollaire que sont les coopératives d’intérêt économique et local (CIEL) pour lutter contre la pauvreté, l’exode rural et pour l’insertion des jeunes qui sont le ferment, l’avenir de la nation. Paix à son âme !

Que Dieu préserve la Guinée et l'Afrique !
Nabbie Ibrahim « Baby » SOUMAH
Juriste et anthropologue guinéen
nabbie_soumah@yahoo.fr

Paris, le 26 novembre 2011




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