CRISE ENERGETIQUE EN GUINEE

Condé se fera-t-il électrocuter ?
Un an après son élection, le président Alpha Condé et son équipe font le dur apprentissage de la gestion du pouvoir. Dans un pays où tout semble prioritaire, son gouvernement est contraint d’aller vite et bien pour combler les innombrables attentes nées du retour à la démocratie, à une gestion plus responsable et transparente de la chose publique. Parmi les problèmes à résoudre figure en bonne place la question de l’électricité. Un an après, pas d’éclaircie dans le ciel guinéen au point que les populations, dans un accès de colère, s’en sont prises au ministre en charge de l’Energie et de l’environnement. Malgré le démenti de ce dernier qui parle d’un bain de foule parmi ses admirateurs (sic), cette action commando reste inédite sous le ciel africain : prendre en otage un ministre parce qu’il n’arrive pas à résoudre la crise énergétique que traverse le pays. Voilà qui va faire réfléchir par deux fois bien des prétendants aux strapontins ministériels qui y voient souvent la consécration d’une carrière, n’ayant d’yeux que pour les avantages liés au poste. Dans le même temps, il faut s’inquiéter de ces nouvelles manifestations de colère des populations qui, pour un oui ou pour un non, sont prêtes à aller à l’épreuve de force, voire à la manifestation violente. C’est aux gouvernants d’en prendre toute la mesure et d’adapter leurs discours et surtout leurs promesses, s’ils ne veulent pas passer pour des incapables. Le ministre de l’Energie et de l’environnement, Papa Koly Kourouma, peut être considéré comme la première victime de la crise énergétique en Guinée. C’est une première décharge d’avertissement . C’est au grand patron, Alpha Condé, de lui donner les moyens de sa politique, sinon lui-même n’est pas à l’abri d’une électrocution. Lors de sa campagne, il avait chargé les régimes précédents en déclarant que la situation énergétique du pays n’était pas normale. Alpha Condé avait promis de changer le visage de ce pays. Cela passe par la production et la distribution permanente de l’électricité, un facteur de production essentielle pour l’économie. C’est vrai que le régime Conté ne lui a légué qu’un pays en ruines. Le challenge pour lui est de faire mieux que son prédécesseur ou, à tout le moins, poser les jalons d’une production énergétique permettant de soutenir l’activité économique. Il est vrai que des projets sous-régionaux d’interconnexion des réseaux électriques existent dans l’espace UEMOA et CEDEAO pour suppléer les carences de certains pays. Mais, en attendant la mise en place effective de ce marché régional de l’électricité, les Guinéens attendent de Alpha Condé que son gouvernement puisse leur assurer un minimum de production propre. Cela passe par la construction de nouvelles centrales hydro-électriques ou thermiques et la réalisation d’un réseau de distribution apte à fournir aux ménages qui le souhaitent le précieux jus. On a vu le tollé que le gouvernement de Wade a essuyé lors des délestages à Dakar. Au Burkina, les syndicats ont contraint le gouvernement à lever les pénalités de retard sur les factures pendant un certain temps. Ce mouvement d’humeur traduit l’impatience des populations à voir leurs conditions de vie s’améliorer. Elles n’ont que trop attendu. En Guinée, l’adversaire de Condé, c’est le temps, face à une demande sociale forte et incompressible.

Abdoulaye TAO

Les Editions de pays

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