Nafi a menti. Silence, on viole ! Par Solo Niaré et Alimou Sow

L’affaire de mœurs qui oppose Dominique Strauss-Kahn (DSK) à Nafissatou Diallo ne concoure plus pour la catégorie du débat de mœurs du siècle, elle rafle désormais ce titre au regard de toute cette escadrille de rebondissements qui chargent l’ex-Directeur du FMI.

Si, au cours de la procédure pénale, une étrange enquête de moralité avait mis en mal la plainte de leur compatriote avant d’aboutir sur un non lieu, un grand nombre de Guinéens se demande si l’impartialité de la justice américaine a réellement été effective. Le titre de DSK au moment de sa forfaiture dans la suite 2806 du Sofitel de New-York et la fortune de son épouse, Anne Sinclair, seraient donc, à leur avis, des éléments assez considérables qui ont pu peser sur la décision finale de cette première procédure.


Pour eux, les droits d’accès à la justice de Nafissatou Diallo ont été bafoués au cours de la procédure pénale au bout de laquelle, Sirus Vance, le procureur de Manhattan a tout simplement décidé de tourner le dos à toutes les preuves apportées par la police scientifique, les preuves médicales et tous les autres éléments du dossier qui établissent la culpabilité de DSK dans cette affaire. Les enquêtes de moralité menées par le bureau du procureur ont fini par accabler la victime donnant ainsi le droit de viol sur Nafissatou à un DSK au sommet de la prédation sexuelle. Elle aurait eu le tort d’avoir menti sur sa vie privée pour obtenir le droit d’asile aux Etats-Unis et d’avoir eu, dans son récit des événements, des approximations d’une victime choquée par la brutalité de l’agression.

Si DSK lui même reconnaît être un libertin, pratique sexuelle encore ignorée dans les cultures subsahariennes dont Nafissatou est issue, pour ces Guinéens qui suivent cette affaire, DSK donne l’impression d’évoluer dans un monde où il ne se fixait plus de seuil à la satisfaction de sa libido.

« Ce type est malade, il a besoin de soins » avait violemment réagi un cambiste de Madina-Marché, à Conakry devant les révélations d’affaires de mœurs antérieures de DSK. Devant cette autre affaire d’agression sexuelle portée devant la justice française par Tristane Banon, jeune journaliste, contre DSK, un ressortissant guinéen du Bronx (USA) a manifesté son incompréhension devant le fait que ces nouveaux aveux sur les conduites « abjectes » de DSK n’aient pas été aussi pris en compte dans le même processus d’enquête de moralité. « C’est carrément du deux poids deux mesures. Si Nafi était aussi soutenu par son pays comme DSK l’est par ses alliés, cette affaire n’aurait pas eu une telle fin pour la pauvre femme de ménage du Sofitel » avait-il rajouté, déçu.

En attendant, dans la communauté guinéenne, les supputations vont bon train. Ceux qui n’ont pas pu régler leur compte sur le terrain politique il y a un an, pendant la dernière échéance électorale, ont trouvé dans cette affaire d’agression sexuelle, une belle opportunité pour remettre au goût du jour le vieux démon de l’ethnocentrisme entre Peulhs, l’ethnie de Nafissatou Diallo et Malinkés, celle dont est issu l’actuel président de la République de Guinée, Alpha Condé. Pour rappel, à la sortie de la dernière élection présidentielle en Guinée, le tissu social du pays avait pris un sérieux coup à la suite de l’exacerbation du repli ethnique que certains candidats avaient utilisé sans scrupules comme argument électoral. La note, dans le cas présent, a été très salée pour une seule personne, Nafissatou Diallo.

L’agression dont la ressortissante guinéenne a été victime par DSK de « l’international socialiste » au même titre qu‘Alpha Condé, dixit le Président guinéen, lui-même, lorsqu’il lui a été donné l’occasion de s’exprimer sur le sujet, s’est transformée du jour au lendemain en une plateforme de prédilection aux divergences politico-ethniques entre franges de l’opposition guinéenne et militants de la mouvance présidentielle. Le président semblait avoir plus de sympathie pour son camarade socialiste DSK que la victime, estimant que « c'est une grande tristesse pour nous ce qui est arrivé ». La Guinée, dans son ensemble, peine à afficher une unité pour soutenir sa ressortissante. C’est ainsi que d’un camp à l’autre, Nafissatou Diallo est soit qualifiée de pauvre victime, soit montrée du doigt comme le maillon décisif d’un complot ourdi contre DSK pour l’empêcher d’être candidat à la présidence en 2012 en France.

Pour Amadou Barry, du comité « Justice pour Nafissatou » : « Les femmes habituellement soudoyées pour faire tomber des personnalités sont des professionnelles. On ne s’improvise pas séductrice ! Or, là encore, rien n’indique que Nafissatou Diallo ait par le passé vécu de ses charmes… »

En attendant, les affaires se suivent et se ressemblent. Leur dénominateur commun : un libertinage sexuel à outrance. Le scandale du Carlton de Lille dans lequel le nom de l'ancien directeur du FMI aurait été cité par des prostituées et des proxénètes et cette toute dernière révélation de Claude Guéant, Ministre Français de l’intérieur, sur un contrôle de DSK en 2006 dans les Bois de Boulogne, haut lieu de la prostitution parisienne, sont encore des éléments qui renforcent les soutiens de Nafissatou dans leur conviction d’une justice mal rendue au pénal.

Tout laisse à croire que cette affaire d’agression sexuelle vient de créer un précédent en jurisprudence qui disculperait désormais tout agresseur sexuel sur une femme qui aurait une fois mentie dans sa vie.

Solo Niaré – Alimou Sow

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