Interview de Sydia, Président de l'UFR

Interview de Sidya Touré, président de l'UFR
Sidya Touré, président de l'UFR : « J’espère que la raison finira par l’emporter et que ce que nous avons vécu au 2ème tour ne se répétera pas...»

Le président de l’Union des Forces Républicaines (UFR), Sidya Touré, a accordé une interview sans langue de bois, mercredi après-midi à la rédaction de Guinéenews©. Dans cet entretien, l’ancien Premier ministre s’est longuement expliqué sur le bilan du président Alpha Condé, du blocage du dialogue politique, de sa récente tournée en Basse Guinée et des tracasseries dont son parti est victime de la part des autorités régionales.

Guinéenews© : Le président Alpha Condé gère la Guinée depuis un an, votre appréciation générale ?

Sidya Touré : Je pense que le bilan est extrêmement mitigé par rapport aux questions qui assaillent le pays. Le bilan est mitigé politiquement, économiquement et sur le plan de la réconciliation nationale. Sur le plan politique, l’essentiel était la mise en place des institutions républicaines pour parachever la transition. Ce gouvernement n’a pas été capable de le faire. Je crois qu’il y a eu beaucoup de manœuvres dilatoires pour empêcher la finalisation de la transition. Sur le plan économique, les faits sont éloquents.

L’inflation est au même niveau. On a certes réduit le déficit budgétaire par rapport au Produit Intérieur Brut (PIB), mais cette réduction est insuffisante, dans la mesure où c’est l’ajustement drastique qui a été imposé aux populations. Ce qui est curieux, c’est le fait que c’est la réduction de l’inflation, qui est l’un des principaux objectifs, n’a pas eu d’effet. Cela a entrainé la déstructuration de tout le système économique et commercial du pays, sans que cela ne soit remplacé par quoique ce soit. Et le résultat est dramatique. Les activités sont au ralenti, voire atones. Ce qui va poser des problèmes sur la croissance économique et la recette fiscale.

Sur le plan de la réconciliation nationale, nous n’avons rien entendu du coté du gouvernement qui tente à dégager l’horizon politique ou social pour mettre les guinéens ensemble en vue de travailler. On ne peut pas avoir des résultats tant que nous ne serons pas ensemble. J’estime que 2011 a été une année difficile pour les guinéens et que les résultats attendus du gouvernement ne sont pas au rendez-vous.

Guinéenews© : En ce qui concerne la réconciliation nationale, les religieux sont à pied d’œuvre…

Sidya Touré : Je ne connais pas les travaux de ce comité. Le problème n’est pas de signer des décrets pour nommer des religieux, mais plutôt de leur donner les moyens. Ces moyens, une fois donnés, doivent permettre au comité d’être en contact avec la totalité des populations guinéennes pour faire avancer cette idée. Mais le principal élément de la réconciliation est aussi l’attitude du gouvernement par rapport aux populations, le fait d’extirper, par exemple, de notre comportement le communautarisme et un certain nombre de choses, qui peuvent amener les guinéens à se tourner le dos. Donc, il ne s’agit pas de signer un décret pour nommer une commission mais de faire en sorte que les comportements des gouvernants et des hommes politiques soient en adéquation avec cet objectif.

Guinéenews© : Economiquement, le gouvernement se félicite de ses performances réalisées en 2011. Votre appréciation ?

Sidya Touré : Je vous ai dit tantôt que le principal élément est la réduction du déficit budgétaire. Mais ceci s’explique du fait que nous n’avons pas dépensé d’argent. Quand vous allez dans les ministères, vous vous rendrez compte que l’argent public ne leur arrive même pas pour acheter les rames de papier. Je crois que cette forme d’assèchement des liquidités n’est pas la solution. Cela permet d’avoir un budget en équilibre, oui. Mais un pays malade comme la Guinée risque de guérir mort. Je dis que le fait que l’Etat n’a pas dépensé, l’Etat n’a pas payé sa dette intérieure, ni son propre engagement, moi je ne vois pas les résultats immédiats d’une telle politique. J’estime que le fait que l’inflation n’a pas reculé est un problème extrêmement préoccupant pour le panier de la ménagère. Ce gouvernement n’a pas été capable de lancer des activités pour créer des emplois en vue de permettre aux jeunes de retrouver un semblant de position tant soit peu. J’estime que sur le plan économique, nous sommes très loin de ce à quoi on pouvait s’attendre.

Guinéenews© : Si vous dressez un bilan mitigé de cette façon, qu’est-ce qui a marché en 2011 à votre avis ?

Sidya Touré : Il y a eu ce retour à un semblant d’équilibre budgétaire. Je crois que sur le plan économique, c’est ce que je peux citer. Sinon, par ailleurs, je ne vois pas grand-chose. La vérité est qu’on n’a pas pu augmenter la production agricole. L’activité économique ne s’est pas ralentie seulement mais elle est pratiquement arrêtée. La confiance, qui est un élément essentiel pour le retour des investisseurs et la mise en place d’une politique économique libérale, n’est pas rétablie.

Guinéenews© : Le gouvernement a pourtant obtenu 700 millions de dollars auprès de Rio Tinto….

Sidya Touré : Oui, les négociations avec Rio Tinto qui nous ont permis d’avoir 700 millions de dollars, mais cela été plus de problèmes que de résultats, dans la mesure où cet argent nous a créé une liquidité dont on ne savait pas quoi faire, sans compter le fait que le gouvernement n’avait pas de programme établi, ni de projet structuré, mis en place et étudié. Ce qui aurait permis d’intégrer cela dans la perspective des prochaines années. Même si cet argent a permis aussi d’améliorer notre position au niveau des devises extérieures de la Banque Centrale, la corrélation de tout cela aurait été une réduction drastique des taux de change. Je crois que cela est plus ou moins en cours. Mais cela ne va pas contribuer à diminuer les prix sur le marché. On est très perplexe. On nous dira, oui, on a réduit le déficit, mais c’est tout. Moi, je n’en connais pas d’autres. Le panier de la ménagère n’a pas beaucoup changé.

Guinéenews© : Sur le plan diplomatique, nous avons vu le président Alpha Condé sur tous les fronts….

Sidya Touré : Le président a beaucoup voyagé, mais la question qu’il faut se poser est de savoir quelles sont les retombées de ces voyages. Moi, je n’en vois pas beaucoup. C’est une bonne chose si ces voyages ont permis à la Guinée de rejoindre beaucoup plus le concert des nations. Les résultats sur le plan diplomatique sont peut-être perceptibles parce qu’il y a une ouverture de la Guinée vers les autres pays, mais sur le plan économique, nous attendons des résultats. Peut-être que l’année 2012 nous apportera des surprises.

Guinéenews© : En se projetant sur le futur, pensez-vous, que 2012 sera meilleure que 2011 ?

Sidya Touré : Quand on arrive de si loin que la Guinée était, il n’y a pas de raison qu’il n’y aura pas un minimum de progrès, mais qu’avons-nous fait en 2011 ? Un taux de croissance de 4 pour cent ne nous mènera pas loin. Nous avons besoin d’une croissance à deux chiffres pour un pays qui arrive de si bas, il faut essayer réellement en quelques années de changer la situation du pays. Quand j’entends dire que nous serons un pays émergeant dans cinq ans, on a envie de savoir qu’est- ce- qu’on veut dire directement par-là. En Guinée, le revenu par tête d’habitants n’a pas tendance à augmenter parce qu’une croissance de 4 pour cent ne change pas grand-chose dans la mesure où la population augmente en même temps. On a besoin de se réveiller. Je ne vois pas une progression de la production locale. L’exportation, en dehors de la bauxite, non plus. J’étais à Fria, la semaine dernière, mais l’usine est arrêtée depuis un mois. Donc, j’ai des interrogations. L’organisation de l’administration ne permet pas non plus d’aller de l’avant. Je vois une augmentation du prix du litre du carburant tous les jours parce qu’on veut récupérer les taxes sur les produits pétroliers par manque de recettes fiscales et douanières. Le budget qui a été présenté n’est pas très optimiste. Il semble être encore un budget de période de restriction au niveau des finances publiques.

Guinéenews© : L’opposition est censée faire des propositions. Qu’est-ce qu’il faut pour faire marcher le pays en 2012 ?

Sidya Touré : Tout est affaire de gestion. Il faut une meilleure gestion. Mais cette gestion ne peut s’appliquer que dans le cadre d’un pays où les citoyens se parlent, où les citoyens se font confiance, où les citoyens regardent tous dans la même direction et où les citoyens ont la même volonté de travailler ensemble. L’administration publique doit être correctement structurée et composée non pas de militants de partis politiques mais de fonctionnaires capables de penser, d’organiser le processus de développement, d’élaborer des projets et de les exécuter.

Guinéenews© : Parlons d’un secteur que vous connaissez bien, celui de l’électricité. Ces derniers temps, nous constatons une nette amélioration de la desserte à Conakry. Pensez- vous que nous sommes bien partis pour en finir avec l’obscurité ?

Sidya Touré : Quand on me parle de cela, je suis très désolé. Parce que treize mois après l’investiture, alors que nous avions réglé ce problème en 1996 en cinq mois. Je pense que le mieux était de trouver des palliatifs pour permettre à la capitale de respirer avant de se projeter sur le moyen terme. Aujourd’hui, j’entends parler de plusieurs projets en même temps, de l’arrivée de groupes thermiques, c’est la même chose. C’est un secteur où les travailleurs ont tous été remplacés par des militants du Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG). Il y a de fortes chances qu’on continue à avoir pas mal de problèmes. Donner du courant à Conakry, quand on parle d’une desserte de 15 pour cent qui a grimpé de 20 à 25 pour cent, ce n’est pas compliqué mais ce n’est pas non plus l’objectif poursuivi. L’électricité à Conakry est une nécessité absolue parce que c’est un besoin domestique pour les citoyens et les petits métiers. Aujourd’hui, tous ces petits métiers sont arrêtés depuis des mois. Donc oui, on peut améliorer la desserte électrique mais à condition de trouver des hommes capables d’évoluer dans le cadre d’une politique préalablement bien définie, organisée et suivie.

Guinéenews© : Le dialogue politique se poursuit depuis des jours au Palais du Peuple, mais sans les ténors de l’opposition, que vous incarnez. Quels sont vos motifs ?

Sidya Touré : Il faut se méfier de saisir tous les mots qui arrivent, du genre un dialogue se tient au Palais du Peuple. Pourquoi, il fallait un dialogue pour faire les élections législatives ? On n’en avait pas besoin. Il suffisait pour cela de reconduire les conditions de l’élection présidentielle. C’est ce qui se fait dans tous les pays du monde. Mais on laisse tomber de coté la loi, on crée un problème et puis après, on nous accuse d’avoir crée ce problème, mais que ce n’est pas un. Nous avons rappelé depuis le mois d’avril qu’il était temps d’aller aux élections. Nous avons organisé la présidentielle dans des conditions que nous connaissons tous, avec le fichier électoral que la Guinée possède. Si quelqu’un vient remettre en cause l’organisation de la commission électorale et l’actuel fichier électoral pour demander une reprise intégrale du recensement électoral, c’est lui qui a un problème. Nous disons, en ce qui nous concerne, qu’il est temps de parachever la transition en allant aux élections.

Mais quand on a soulevé autant de problèmes, cela nécessite que l’on y revienne parce que le poids politique que nous représentons au sein de l’Alliance pour la démocratie et le progrès (ADP) et au collectif des partis pour la finalisation de la transition, constitue plus de 67 pour cent de l’électorat du premier tour.

Nous avons besoin qu’une Assemblée soit mise en place conformément à la volonté du peuple. Le fait de vouloir biaiser cela est à mon sens l’élément essentiel sur lequel il faut insister. Le dialogue a débuté là. C’est nous qui l’avons demandé. Nous avons dit que nous n’irons pas aux élections dans ces conditions parce que tout est en train d’être changé. Nous voulons qu’on se rencontre pour en discuter. Nous avons mis en place un comité de facilitation, sous la conduite de Mgr Albert Gomez. Mais nous nous sommes aperçus que ce comité avait tendance à fonctionner de manière unilatérale, en prenant chaque fois des instructions du pouvoir pour les faire exécuter.

Nous demandons un dialogue structuré et organisé comme nous l’avons toujours fait. La CENI a été créée au temps de Lansana Conté. Mais le dialogue d’alors, c’était entre les partis d’opposition et le gouvernement, assisté par les partis qui le soutenaient. Ce qui est normal. Aujourd’hui, on veut nous faire une conférence nationale sur un débat qui a lieu sur des choses précises relevant de la loi. Il ne s’agit pas de prendre en compte un Centre idéologique, qui doit nous parler de son positionnement politique, ou de la gauche ou de la droite.

Nous avons demandé de nous asseoir face-à-face pour discuter de tous ces problèmes avec le comité de facilitation. Mais au lieu de cela, on a créé un méli-mélo, au point que l’on ne s’entendra pas. On fera du tout sauf du dialogue. Cela ressemble étrangement à ce qu’on nous a fait lors du second tour de la dernière présidentielle.

Guinéenews© : L’opposition ne prend-elle pas à la légère la menace du ministre Alhassane Condé qui dit que le dialogue ira jusqu’au bout, et tant pis pour les déserteurs ?

Sidya Touré : Ça, c’est leur problème. Moi, je ne considère pas cela comme quelque chose qui m’engage. Je dis que nous représentons près de 70 pour cent des populations guinéennes ayant voté au premier tour. Nous souhaitons la tenue des élections transparentes et acceptables par tous. Comment voulez-vous que nous allions nous asseoir, non pas avec le ministère mais avec d’autres partis pour juste parler dans la salle ? Ce jeudi, on leur a donné de l’argent, distribué par je ne sais qui, deux millions de francs chacun. Est-ce de cette façon qu’on peut organiser un dialogue acceptable dans un pays ? Je dis non !

Guinéenews© : Vous venez d’effectuer une tournée en Basse Guinée du 13 au 16 Janvier. Il semble que les autorités locales auraient tenté de disperser vos militants. Qu’est-ce qui s’est réellement passé ?

Sidya Touré : Nous avons trouvé des militants mobilisés. Cela a commencé par Kolabounyi avant d’arriver à Boké. Je crois que cela a effrayé les autorités. Et à partir de là, on a commencé à prendre les dispositions pour entraver cette mission. Nous étions partis rencontrer les structures du parti pour préparer les ateliers dans la perspective des élections législatives. Mais comme certains militants dans certaines localités ont voulu se manifester, les autorités locales ont souhaité trouver les voies et moyens pour contourner cela en vue d’arrêter, bloquer et menacer les commerçants. C’est à Boffa que les choses se sont un peu compliquées parce qu’on a interdit aux jeunes de sortir pour aller à leur lieu de rencontre. On a souhaité les entasser dans une salle, en mettant la Force de sécurisation du processus électoral (FOSSEPEL) et la gendarmerie en branle. J’y suis allé personnellement pour demander que la réunion se tienne dehors, tout en disant que la FOSSEPEL ne doit pas s’occuper du déplacement des leaders politiques mais plutôt d’aider à gérer le processus électoral. Tout cela vient, bien sûr, des autorités, chaque fois quand les leaders politiques doivent se déplacer. Je vous passe toutes les tracasseries, les menaces de fermeture de magasins, les commissions dépêchées la nuit pour empêcher les lectures du Coran. Enfin, c’est un peu partout. Mais c’est à Boffa qu’on a pu résoudre ce problème dans la matinée, en disant que notre adresse se fera dehors et non dans une salle.

Guinéenews© : Quels sont les messages véhiculés aux militants….

Sidya Touré : Le message est que nous devons préparer les élections législatives. Cela me semble extrêmement important. On ne peut pas entraver le déplacement des leaders politiques. Nous avons un président issu de l’opposition. En tant que tel, il ne devrait pas donner des instructions pour interdire aux leaders d’organiser des rencontres au niveau de leur parti politique. Nous avons également passé des messages relatifs à nos cadres qui ont été licenciés, notamment notre fédéral de Boké qui a été démis de ses fonctions quelques jours avant notre arrivée. Nous avons dénoncé cela. Nous avons dit que nous nous battrons contre l’arbitraire. Nous avons dit que les partis politiques du Collectif des partis pour la finalisation de la transition et de l’Alliance pour la Démocratie et le Progrès (ADP) s’engagent à aller jusqu’au bout pour la tenue d’élections législatives justes, transparentes et acceptables par tous. Mais non pas des élections fabriquées pour permettre à un camp de s’accaparer de l’Assemblée nationale, en dehors du processus électoral normal. Parce que donner des comparaisons du style du genre on a fait ceci au Gabon, ou on a fait cela en Côte d’ivoire, ce n’est absolument pas vrai. La Cote d’ivoire, comme son président l’a dit ici, n’a pas changé le fichier électoral. Il n’a pas changé non plus la commission électorale. Ceux qui n’ont pas voulu aller aux élections, avaient d’autres raisons de ne pas y aller.

Guinéenews© : Vous avez été troisième au premier tour de la dernière présidentielle. Est-ce que vous avez senti l’engouement des militants autour de vous pendant votre tournée en Basse Côte ?

Sidya Touré : Les citoyens sont là, ils n’ont pas bougé. Au contraire, ils sont plus mobilisés dans la mesure où ils ont vu ce que ce nouveau gouvernement a pu faire pour eux pendant plus d’une année. L’impact de l’action gouvernementale sur leur vie au quotidien ne se faisant pas sentir, nous avons des nouveaux militants qui viennent grossir nos rangs.

Guinéenews© : Alors, quelle sera la prochaine étape ?

Sidya Touré : Nous allons continuer notre tournée pour sensibiliser les militants, organiser des séminaires, des ateliers pour former nos responsables locaux dans chacune des préfectures à la préparation des élections législatives dans la mesure où nous aurons des candidats dans ces différentes zones. Quels que soient les pièges, nous continuerons notre tournée. Nous savons que des choses se préparent. Pensant notamment qu’on irait à Coyah, des jeunes munis de pierres avaient été positionnés à Gombayah, pour attaquer notre convoi. Ce sont autant de manœuvres visant à empêcher notre tournée, mais nous la poursuivrons. Il n’y a aucun doute.

Guinéenews© : Il semble que votre parti a rencontré le comité de facilitation mardi. De quoi s’agissait-il ?

Sidya Touré : Nous avons rencontré Mgr Albert Gomez avec trois autres membres du comité de facilitation. Nous leur avons dit ce dont ils sont chargés en réalité. La facilitation ne peut pas écouter une seule partie. Sinon, ce n’est plus une facilitation. Et si c’en n’est pas une, on se demande ce que cela peut être. Je crois qu’on s’est bien compris. Nous attendons leur réaction pour décider de la position à prendre pour définir un dialogue qui sera structuré ou pas. Nous n’irons pas dans une salle avec 40 ou 50 partis à qui on va donner de l’argent pour venir voter. Nous n’accepterons pas cela.

Guinéenews© : C’est dire que les tractations continuent pour votre retour à la table des négociations…

Sidya Touré : Les tractations continuent, mais pas pour notre retour. La vérité est que, c’est le collectif et l’ADP qui sont demandeurs du dialogue, et non l’administration. Pendant qu’on le demandait au mois d’avril jusqu’à la marche du 27 septembre 2011, on n’a vu ni Centre, ni Gauche, ni Droite. Il y en a qui nous ont condamné à cause de notre marche du 27 septembre. Donc, ceux-là ne peuvent pas venir nous dire, non c’est un dialogue inclusif. Oui, il est inclusif, mais il est inclusif dans la mesure où s’agissant des problèmes purement techniques relatifs aux élections, ceux qui veulent aller aux élections se mettent d’un côté avec les conditions du pouvoir et ceux qui veulent un changement par rapport aux conditions posées par le pouvoir, se mettent de l’autre.

Nous avons dialogué de cette façon tout le temps au sein des forces vives. A un moment donné, on a voulu introduire une troisième force à Ouagadougou, le président Compaoré l’a refusée. Avec la CEDEAO, idem. Quand nous sommes allés à Abuja pour expliquer nos problèmes, une autre troisième force, conduite par des femmes, avait été dépêchée, mais on l’a refusée. La CEDEAO n’avait reconnu à l’époque que les forces vives, en disant que c’est elles qui se battaient pour faire changer les choses en Guinée. L’Organisation sous- régionale nous avait demandé de discuter avec le gouvernement d’alors, en excluant la troisième force. Ou on appartenait aux forces vives en partageant leurs idées, ou on était avec le gouvernement, dont on partage la position. Et le débat était clair. Il en était ainsi à Ouagadougou, ou à Conakry en 2006- 2007 lors de la mise en place de la commission électorale nationale indépendante (CENI).

Guinéenews© : Rappelez-nous cette péripétie aussi

Sidya Touré : A l’époque, le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) avait refusé de participer au dialogue, estimant que nos positions n’étaient pas suffisamment radicales. A la fin des négociations, il s’est joint à nous pour demander qu’on lui confie la CENI. C’est très gentil, mais il n’a pas été question de créer une troisième force au dialogue. Le dialogue, comme son nom l’indique, c’est entre deux personnes ayant des opinions divergentes. Ce qui se fait aujourd’hui, c’est une discussion entre les partis de la mouvance. Peut-être, quand ils auront fini, ils appelleront ceux qui ne partagent pas ces points de vue pour la confrontation.

Guinéenews© : Malgré tout le dialogue se tient avec la prise en compte de vos revendications ?

Sidya Touré : Lesquelles ?

Guinéenews© : Mais vos revendications relatives au processus électoral….

Sidya Touré : Non, nos principales revendications ne viennent pas de là. Elles proviennent plutôt de la première réunion convoquée par le ministre de l’administration du territoire. Or, celui-ci ne pouvait pas convoquer une telle réunion. C’est à la facilitation d’appeler les deux parties. C’est dans la salle qu’on nous a fait croire qu’il y a un troisième groupe qui s’appelle le Centre. Mais ce n’est pas un débat idéologique mais plutôt un débat sur les textes, avons-nous dit. Alors, nos deux émissaires ont fait comprendre qu’ils n’étaient pas venus pour voter mais pour écouter.

Ce même jour, on nous a fait comprendre aussi que deux membres de l’administration vont siéger au sein du comité de facilitation. Ensuite, on nous a fait comprendre qu’il fallait voter pour conserver les deux ou trois groupes. Nous, on n’était pas venus pour voter dans la mesure où le corps électoral est inconnu. Les partis dans la salle votent à partir de quoi ? Veut-on faire admettre qu’un leader qui a dix militants a le même poids qu’un autre qui en a cent ? Cela ne s’est jamais vu dans aucun système démocratique. Lors de la création de la CENI, quand il a fallu désigner les commissaires, il y avait 46 partis. Mais c’est sur la base de la représentativité qu’on avait procédé aux désignations. On s’est référé aux résultats des précédentes élections. Et chaque parti retenu a désigné son représentant. A l’époque, on n’avait pas tenu compte du nombre de partis, mais de la représentativité.

Nous nous sommes retirés du dialogue à partir du moment où le comité de médiation dont le rôle est de faciliter les négociations, a demandé de voter avec un corps électoral qui n’est pas prédéfini. Le fait d’accepter trois à quatre groupes face-à-face pour discuter sur des questions claires, est la raison qui nous a poussés à nous retirer.

Guinéenews© : Je repose une de mes questions autrement. Beaucoup d’acteurs politiques issus de la Basse Guinée se réclament leaders de la région. Est-ce que vous vous sentez menacé ?

Sidya Touré : Nous sommes tous originaires d’une région en Guinée, mais cela ne s’exprime pas en parti politique. Moi, je suis originaire de la Basse Guinée, je respecte tout ce qu’il y a comme imams ou vieux chez nous, mais mon parti, c’est l’Union des Forces Républicaines, un parti transversal. Je suis ressortissant d’un pays. Quand il y a des questions sociales relatives à cette région, je m’y implique, mais cela ne concerne pas le fonctionnement et la vie de l’UFR. C’est de cette façon que nous avons voulu et conçu le parti dès le départ et il fonctionne comme tel.

Guinéenews© : Est-il difficile d’être un leader transversal dans un pays comme la Guinée ?

Sidya Touré : Très difficile. Mais cela correspond à ma personnalité. Je ne conçois pas qu’un leader politique guinéen prône l’ethnocentrisme, le communautarisme ou le régionalisme parce que cela n’améliore pas le débat. Bien au contraire, cela nous mène dans des situations comme celles que nous vivons aujourd’hui. En son temps, j’avais invité tout un chacun à penser « Guinée ». Au vu des méfaits des particularismes, j’espère que les militants et les électeurs sortiront de la perception des autres où on veut les enfermer. Et enfin penser que si nous faisons quelque chose ensemble, nous avons toutes les chances de réussir. Contrairement, l’échec n’est pas loin de ce que nous sommes en train de faire maintenant.

Guinéenews© : Votre dernier mot ?

Sidya Touré : Merci ! J’espère que la raison finira par l’emporter et que ce que nous avons vécu au second tour de la présidentielle ne répétera pas. Tirer en longueur pour qu’au bout on nous dise un beau matin, on va aux élections quelque soient les conditions. Les législatives sont une opportunité permettant à notre pays de se doter d’une Assemblée où il y aurait la diversité et qui pourrait accueillir tous les débats politiques et résoudre les tensions sociologiques que nous sommes en train de vivre aujourd’hui.

Il y aura 114 députés qui pourront représenter, et les opinions, et les régions, et les ethnies, et les communautés. Les débats d’idées s’installeraient au parlement. Mais vouloir caporaliser le parlement pour en faire une deuxième caisse de résonance, je crois que ce serait dommage. L’exemple d’un Conseil national de la transition (CNT) à la solde du pouvoir, dans la mesure où il n’a jamais rejeté une requête du gouvernement actuel à cause des résultats mitigés, devrait nous inspirer pour éviter l’avènement d’une Assemblée monocolore.

Je me demande qu’est-ce qu’on voudrait faire d’une Assemblée monocolore, qu’on ne fait pas déjà avec le CNT. Tout ce qu’il y a comme projet, programme politique, on le fait passer en ce moment au CNT. Cela n’a pas amélioré notre situation, je ne pense pas qu’une Assemblée monocolore l’améliorera. Par contre, ce qu’une Assemblée monocolore peut nous éviter, c’est la diversité d’opinions dont on a tant besoin pour régler les problèmes de réconciliation, d’unité nationale, de consensus pour enfin engager ce pays sur la voie du développement économique tant souhaité.

Guinéenews© : Je vous remercie

Sidya Touré : C’est moi qui vous remercie.

Propos recueillis par Abdoulaye Bah à Conakry pour Guinéenews©

















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