L’immunité pour DSK?


La première audience liée au procès civil intenté par Nafissatou Diallo à Dominique Strauss-Kahn aura lieu le 28 mars. Cette rencontre entre les avocats des deux parties devait initialement se dérouler le 15, mais un problème d’emploi du temps du Juge Douglas McKeon, Président de la Chambre Civile du Bronx a rendu nécessaire le report de séance. Pour la petite histoire, le branle-bas de combat a déjà commencé parmi les journalistes à New York. Va-t-on assister à la même ruée que lors des comparutions pénales de DSK ? Peut-on être assuré de pouvoir entrer dans la salle ?

Cette fois, le juge a eu la très bonne idée d’annoncer par avance que les plaidoiries seraient filmées de bout en bout, ce qui pourrait réduire l’affluence. Surtout, ni Dominique Strauss-Kahn, retenu en France ce jour là par sa comparution à Lille, ni Nafissatou Diallo ne seront présents à une audience essentiellement consacrée à la recevabilité de la plainte, et au Droit.

En l’occurrence, le juge devra décider, dans les semaines suivantes, si, comme entendent le prouver les avocats de DSK, ce dernier bénéficiait de l’immunité diplomatique au moment de sa rencontre avec la femme de Chambre le 14 mai 2011, et au moment de la plainte au civil datée du 8 aout. Le patron du FMI avait invoqué brièvement ce privilège tandis que les policiers de l’aéroport lui passaient les menottes, avant d’y renoncer ostensiblement quelques heures après, lorsque les agents de la Special Victims Unit lui ont demandé s’il comptait s’en prévaloir.

Ses défenseurs déclarent que leur client comptait ainsi démontrer sa bonne foi et son intention de se soumettre à l’enquête pour « être lavé de tous soupçons » (« To clear his name »). S’il demande enfin l’immunité aujourd’hui, c’est, selon lui, parce que les charges ont été levées au pénal, et qu’il souhaite faire valoir ses droits pour s’épargner une nouvelle procédure « dénuée de fondement ».

Le conseil d’administration du FMI a pourtant émis, dès le 17 mai, soit trois jours après son arrestation, un communiqué rappelant qu’en vertu des statuts du Fond Monétaire, l’immunité ne vaut que pour les actes commis dans le cadre des fonctions officielles du Directeur. Or ce dernier était à titre privé à New York le 14 mai.

William Taylor et son équipe n’ont pourtant pas lésiné pour préparer leur argumentaire juridique du 28 mars. A lire leur plaidoirie, longue de 24 pages et bourrée de références jurisprudentielles, on ne peut que constater qu’ils ont peut-être des chances d’emporter l’acquiescement du juge, au prix, certes, d’un complexe mikado juridique.

Les avocats assurent que le règlement du FMI est trop restrictif, car il entre en contradiction avec une convention internationale datant de 1947 qui accorde une immunité diplomatique totale aux dirigeants d’organisations spécialisées de l’ONU comme le FMI.

Seul problème : ce traité n’a pas été ratifié par les Etats-Unis. Les avocats assurent néanmoins que ce texte a acquis une valeur coutumière et s’impose dans la pratique internationale.

Les seuls textes en vigueur au niveau fédéral américain sont une loi américaine de 1945, et une convention des Nations Unies de 1961, qui toutes deux limitent l’immunité aux actes officiels des dirigeants d’organisations spécialisées. Autre complication pour DSK : le FMI n’a-t-il pas dans les faits, et comme il en a la possibilité même dans le cadre de la convention de 1947, décidé de lever l’immunité de son directeur le 17 mai ?

Ce sac de nœud devra être résolu par le juge Douglas McKeon, mais les deux parties ont déjà décidé de faire appel si la décision ne leur convient pas. Un éventuel procès ne pourrait commencer que dans un an à 15 mois selon le magistrat.

Source : lexpress.fr

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