Nicolas Sarkozy, retraité mais pas trop


Comme souvent, il y a le message officiel et la réalité. Le premier est admirablement relayé par son ami Brice Hortefeux : "La ligne de communication qu'on s'est définie, c'est que Nicolas Sarkozy se tient éloigné de la politique quotidienne, il ne veut en rien interférer. Son attention se porte sur les questions de société et les questions internationales."

Et le député européen de poursuivre avec toute la mauvaise foi amicale dont il est capable : "Il se renseigne sur ce qui se passe, mais se limite à cela. Il n'a aucune appétence pour la politique politicienne." "Il ne veut pas s'en mêler, il est très en retrait par rapport à la vie politique, il y accorde très peu d'importance", renchérit un des collaborateurs de M. Sarkozy.

L'ex-chef de l'Etat serait "super-cool, en forme, serein", selon un proche. Qui ajoute : "Il est très apaisé, presque soulagé, il veut se laisser du temps pour réfléchir à ce qu'il fera à la rentrée. Il voit des amis, passe beaucoup de temps avec sa famille, se consacre au sport."

"TRÈS CONCENTRÉ"

Il sort de temps en temps, comme le mardi 5 juin, où il a été vu en compagnie de son épouse, Carla, aller au cinéma regarder le film que Bernard Henri-Lévy a consacré à la guerre en Libye, Le Serment de Tobrouk. Il a ensuite bu un verre avec le philosophe dans un café de la rue Bonaparte.

Côté travail, il a emménagé dans ses bureaux du 77, rue de Miromesnil, à Paris, où "il passe tous les jours" et où il achève la composition de l'équipe de sept personnes à laquelle il a droit. Il y reçoit son courrier, quelques politiques, mais aucun journaliste. "Si je suis battu, vous n'entendrez plus parler de moi", avait-il confié à la presse lors d'un voyage en Guyane fin janvier.

Jeudi 28 juin, il a rencontré dans un grand hôtel parisien l'opposante birmane Aung San Suu Kyi. Le mardi 19 juin, il s'était rendu à une séance du Conseil constitutionnel pour l'examen de questions prioritaires de constitutionnalité. "Il était très digne, très concentré. Il n'a pas sorti son téléphone portable, pas envoyé de textos", raconte un des participants. Un retraité consciencieux, en quelque sorte.

Mais, derrière l'image véhiculée par les amis, les faits sont tout autres. Depuis son retour de vacances au Maroc, il passe ses journées pendu au téléphone. Il appelle tout le monde, Nathalie Kosciusko-Morizet, Xavier Bertrand, Bruno Le Maire, Jean-François Copé ou le député européen Brice Hortefeux, avec lequel il s'entretient plusieurs fois par semaine, comme au temps de leur ascension vers le pouvoir. A tous, il précise : "Je ne t'ai rien dit, hein ? Tout cela reste entre nous. Tu ne m'as pas eu."

Tout l'intéresse, à commencer par la constitution de l'"association des amis de Nicolas Sarkozy". C'est lui qui a insisté pour qu'elle s'ouvre aux sarkozystes non historiques afin de lui donner une envergure plus large. Il a également demandé qu'elle ne participe pas à la bataille pour la présidence de l'UMP en novembre et qu'elle ne soit pas un courant du parti, juste un club pour défendre son bilan.

Il a également regardé les élections législatives de très près. Dès le dimanche du second tour, il a passé une partie de sa soirée au téléphone pour remonter le moral des battus comme Nadine Morano ou son fidèle Claude Guéant et pour féliciter les vainqueurs comme Henri Guaino, son ancienne plume, qu'il avait incité à se présenter, ou Nathalie Kosciusko-Morizet.

"IL SUIT DE TRÈS PRÈS"

Xavier Bertrand, élu à l'arraché dans l'Aisne, a aussi eu droit à son petit coup de téléphone lundi matin 18 juin. "Bravo, lui dit l'ancien président, tu t'es bien battu. Que vas-tu faire maintenant ?" M. Bertrand lui répond qu'il va se présenter à la présidence du groupe UMP à l'Assemblée nationale. "Quels sont les risques ?", lui demande M. Sarkozy. "Aucun, à part celui de gagner", rétorque M. Bertrand. L'ancien chef de l'Etat s'est amusé de tant de culot.

Il a moins ri lorsque, le lendemain, une fois l'ancien ministre du travail défait par le copéiste Christian Jacob, la rumeur a couru qu'il serait intervenu auprès de députés pour les faire voter en faveur du perdant. "Il était fou furieux d'apparaître comme se mêlant de cette élection, rapporte un de ses amis. Il a immédiatement demandé à M. Bertrand de démentir." "Il suit de très près, mais il refuse de s'engager", atteste ce dernier.

Du conseil à l'action, il n'y a parfois qu'un pas. Le dernier épisode de la saga des Hauts-de-Seine, son fief historique, est emblématique des immixtions de M. Sarkozy dans la vie politique. La lecture des extraits du livre Le Monarque, son fils, son fief (Ed. du Moment, 200 p., 18,5 euros), de Marie-Célie Guillaume, directrice de cabinet du président du conseil général Patrick Devedjian, qui dépeint au vitriol les moeurs politiques du département, l'a mis hors de lui. Il a immédiatement appelé de nombreux élus, dont son fils Jean, pour leur demander de tout faire pour déboulonner M. Devedjian. Le putsch a, pour l'instant, échoué. Mais l'ancien président a juré de se venger.

"Pour un retraité, il est drôlement actif", sourit un élu. Lors du dîner de Cayenne, en janvier, M. Sarkozy avait prévenu à propos de son éventuel retrait de la vie politique que la vie publique est comme une drogue : "L'aiguille, il faut l'enlever progressivement. "

Vanessa Schneider

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